Harpur et Iles (9) : Question d’éthique, de Bill James
L’éthique dont il est question ici est autant celle des policiers que des truands. Et même, un peu, celle des journalistes.
Le point de départ et un braquage mis en échec par la police. Durant l’intervention, l’inspecteur Harpur abat un des braqueurs. Le père de ce dernier, Doug Webb, ne pense dès lors qu’à se venger. Or, Harpur a une nouvelle maîtresse. Denise est étudiante, et par ailleurs la meilleure amie d’Helen, la compagne de Jack Lamb, trafiquant d’œuvres d’art et indicateur privilégié de Harpur. Pour Webb, il n’y a pas de doute, Denise fait le lien entre Harpur et Lamb. L’assassiner, c’est à la fois se venger de Harpur et faire passer un message explicite à Lamb.
C’est bien entendu là que les questions d’éthique entrent en jeu : pour les complices de Webb, dont le désormais bien connu des lecteurs de la série Ralph « la Panique » Ember, s’en prendre à Denise sans être certain de son implication relève de l’erreur stratégique et de la faute morale. Pour Harpur, qui se doute du danger que court Denise, la question qui se pose est de savoir s’il faut ou non la prévenir et éventuellement rompre avec elle. Enfin, une journaliste entre dans le jeu, décidée à enquêter sur les liens entre Lamb et la police, au risque de mettre en danger l’indicateur et ses proches.
À partir de là, Bill James met en place une intrigue complexe, certes, mais extrêmement limpide dans son traitement. Comme un jeu de dominos, chaque pièce qui tombe semble en entrainer une autre dans sa chute sans que l’on voie clairement ce qui arrivera en bout de chaîne.
Tout cela, bien entendu, s’appuie par ailleurs sur des personnages hauts en couleurs et tiraillés entre leurs vies privées et professionnelles, entre leurs désirs et la nécessaire adaptation à une situation qu’ils ne contrôlent pas totalement. Le trio de malfrats constitué par Webb, Ember et Sanquhar-Perry, décidé à mener à bien un braquage mais devant composer avec la volonté de vengeance de Webb, est particulièrement réussi ; d’autant plus que, comme à l’accoutumée, Bill James se plaît à composer des personnages complexes dont la bêtise ou l’intelligence est toujours contrebalancée à un moment ou un autre par une certaine ruse, capacité d’adaptation ou une confiance en soi qui finit par confiner à la naïveté. Si l’on ajoute à cela le bras de fer discret entre Harpur et Iles et le réjouissant cynisme de ce dernier, on a là, incontestablement, un des meilleurs volets de la série de Bill James.
Bill James, Question d’éthique (Gospel, 1992), Rivages/Noir, 2011. Traduit par Danièle Bondil. 380 p.
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