Harpur et Iles (11) : En de bonnes mains, de Bill James

Publié le par Yan

Raoul Caesar Brace, dit Le Très Sympathique Original, et Lester Magellan, deux malfrats à la petite semaine sont retrouvés morts, leurs cadavres placés selon une évidente mise en scène qui rappelle un autre double homicide de ce type dans lequel deux truands, encore, avaient été tués. Le point commun de ces hommes, outre leur appartenance à la pègre, est d’avoir été impliqués dans des affaires non résolues qui ont particulièrement irrité le chef adjoint de la police Desmond Iles.

Cette troublante coïncidence est pour Mark Lane, le chef, une occasion de mettre Iles sur la touche. Pour cela, il compte utiliser l’inspecteur Harpur qui se trouve pris entre le marteau et l’enclume, entre son devoir vis-à-vis de l’institution et sa fidélité à Iles.

Dans ce onzième volume des enquêtes de Harpur et Iles, Bill James, dans la lignée du précédent roman de la série, pénètre toujours plus dans la vie intime de ses personnages. Harpur et Iles, évidemment, mais aussi les truands et plus particulièrement un duo d’ambitieux décidés à braquer à un caïd local, et le patron de bar Ralph la Panique dont la fille entretenait une relation avec un des malfrats assassinés. Surtout, James, à travers l’enquête que mène Harpur sur le double homicide et les tensions internes à la police – qui se soldent d’ailleurs par la mort d’un flic lors d’une bagarre – se plaît à brouiller les frontières entre les criminels et ceux censés faire respecter la loi.

Ce choix de se concentrer toujours plus sur les états d’âmes des personnages, sur les trajectoires tortueuses des liens qu’ils entretiennent, tend à rendre l’enquête d’Harpur – qui dévie assez vite vers une autre investigation – plutôt accessoire. Néanmoins, l’acuité des dialogues, le cynisme des personnages et leur humour noir, le côté rocambolesque de certaines situations, compensent ce léger déséquilibre. Par ailleurs, cette ironie mordante et plaisante ne doit pas occulter quelque chose d’essentiel : tout cela est éminemment noir et le cynisme n’est là que pour permettre aux personnages de garder un semblant de contenance et la tête juste hors de l’eau.

Au bout de onze romans, Bill James ne s’épuise ni ne tourne en rond. Au contraire, il continue patiemment à tisser la toile de cette impressionnante et tragique comédie humaine, rattachant telle situation à une autre qui remonte au premier volume, rappelant tel personnage que l’on n’avait oublié ou en plaçant au premier plan un autre vite croisé précédemment. Toujours bluffant.

Bill James, En de bonnes mains (In Good Hands, 1994), Rivages/Noir, 2013. Traduit par Danièle Bondil. 303 p.

Du même auteur sur ce blog : Raid sur la ville ; Lolita Man ; Le cortège du souvenir ; Protection ; Franc-jeu ; Sans états d’âme ; Club ; À cheval sur une tombe ; Question d’éthique ; Retour après la nuit ;

Publié dans Noir britannique

Commenter cet article