Le soleil rouge de l’Assam, d’Abir Mukherjee

Publié le par Yan

Réglé comme du papier à musique, Abir Mukherjee est de retour, un an après le précédent épisode, avec un nouveau roman mettant en scène le capitaine Sam Wyndham et son adjoint, le sergent Satyendra Banerjee.

C’est en février 1922, peu de temps après les événements contés dans Avec la permission de Gandhi, que nous retrouvons Wyndham. Le policier opiomane a quitté Calcutta et ses fumeries pour un ashram de l’Assam avec l’espoir de se défaire de l’emprise de la drogue. Le séjour qui ne s’annonçait déjà pas de tout repos prend rapidement un tour étrange. Une ombre surgie du passé plane sur Wyndham et un cadavre ne va pas tarder à faire son apparition.

On est en droit, dans ce genre de série de romans à la publication très régulière, de s’inquiéter d’un éventuel essoufflement. À ce point précis de son œuvre, Abir Mukherjee semble toutefois bien tenir le rythme et, mieux encore, il réussit à se renouveler. Ici, cela passe par une double intrigue. D’un côté le mystère de l’ashram, de l’autre, une vieille affaire qui nous entraîne auprès d’un très jeune Wyndham, alors agent de police à White Chapel, en 1905. Au sujet de fond qui sous-tend la série depuis le début – la description de la société coloniale indienne et la montée en puissance de la revendication anticolonialiste – Abir Mukherjee en ajoute un autre qui, au fond, est un peu le même : les rapports de classes dans l’Angleterre au sortir de l’ère victorienne, et, dans les classes laborieuses, les rapports entre les différentes communautés. Une grande partie de cette enquête se joue ainsi à travers la question de l’émigration juive d’Europe de l’Est et de la manière dont cette communauté, nouvelle et différente, tient le rôle évident de bouc-émissaire.

Voilà des sujets on ne peut plus sérieux qu’Abir Mukherjee aborde avec finesse et, même s’il se fait plus discret au fil des livres, un humour indéniable et salvateur. Ajoutons encore que l’auteur prend plaisir dans les deux enquêtes qu’il met en scène, à jouer avec le genre. Un meurtre en chambre close, un autre dans un lieu où sont réunies des personnes qui ont chacune leurs raisons d’assassiner la victime… Wyndham et Banerjee dont l’arrivée, bien que tardive, est un pur plaisir, se muent ainsi en Sherlock Holmes ou Hercule Poirot à la sauce Mukherjee : désabusée parfois, un peu cynique et toujours très enlevée.

Bref, c’est une nouvelle fois un pur plaisir de lecture et l’on a déjà hâte d’être à dans un an.

Abir Mukherjee, Le soleil rouge de l’Assam (Death in the East, 2019), Liana Levi, 2023. Traduit par Fanchita Gonzalez Batlle. 412 p.

Du même auteur sur ce blog : L’attaque du Calcutta-Darjeeling ; Les princes de Sambalpur ; Avec la permission de Gandhi ;

Publié dans Noir britannique

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