Ton avant-dernier nom de guerre, de Raúl Argemí

Publié le par Yan

ton avant-dernierSuite à un accident de voiture dont il peine à se souvenir, le journaliste Manuel Carraspique, se réveille dans le dispensaire d’un bled perdu du fin fond de l’Argentine. Dans le lit voisin, recouvert de bandages, se trouve un homme, un indien Mapuche, soupçonné d’avoir commis un massacre dans sa communauté. Voyant là l’occasion d’obtenir un scoop, Carraspique entreprend, entre deux prises de médicaments, de faire parler son voisin de chambre et voit prendre forme une histoire aussi étonnante qu’échevelée, comme si le Mapuche d’à côté possédait plusieurs identités.

Récit court (environ 150 pages) et étonnant, Ton avant-dernier nom de guerre tient autant du conte que du roman noir. Avec un journaliste abruti par les médicaments et un interviewé se trouvant dans un semi-coma, la vérité devient un concept très fragile. Les récits plus ou moins cohérents qui s’accumulent et se superposent créent une ambiance oscillant entre paranoïa et fantasmagorie, égarant le lecteur comme Carraspique. Au risque parfois, dans cet empilement vertigineux de vies, de mener le lecteur à l’indigestion. Cent cinquante pages c’est peu, mais cela peut apparaître parfois long quand les flashes se suivent et que l’on peine avec le héros à y trouver une cohérence.

Pour autant, on aurait tort de se cantonner à la frustration provoquée par ces scènes apparemment incohérentes et par la sensation d’abrutissement que cette suite de récits parcellaires provoque là encore autant chez le lecteur que chez le héros. Car ça n’est ni plus ni moins qu’un puzzle, un jeu de l’esprit, qu’Argemí nous propose. Et quand, finalement, les pièces s’emboitent, le final étonnant nous fait dire que les quelques moments d’inconfort que l’on a pu ressentir auparavant valaient le coup. Et si l’on doit donner un conseil à ceux qui s’aventureront dans cette lecture atypique, c’est de l’accomplir d’un seul trait.

Raúl Argemí, Ton avant-dernier nom de guerre (Penúltimo nombre de guerra, 2004), Rivages/Noir, 2013. Traduit par Alexandra Carrasco-Rahal.

Du même auteur sur ce blog : Les morts perdent toujours leurs chaussures ; Patagonia tchou-tchou ; À tombeau ouvert ;

Publié dans Noir latino-américain

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Y
http://yossarianblogdotcom.wordpress.com/2013/10/31/ton-avant-dernier-nom-de-guerre/<br /> <br /> Je suis un peu déçu quand même.
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Y
<br /> <br /> Oui, j'ai vu ça. Pour ma part, je m'attendais aussi à la fin mais j'ai tout de même été surpris (dans le genre "il ne va tout de même pas faire ça... ah, si") Bref, j'ai été surpris de ne pas<br /> être surpris et je n'ai pas trouvé ça désagréable. Et puis le reste du cheminement, toutes ses scènes qui s'entremêlent, se coupent, m'a vraiment plu.<br /> <br /> <br /> <br />
S
Les romans puzzles, j'adore ; les auteurs argentins aussi ; donc...
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Y
<br /> <br /> ... donc foncez et venez m'en reparler!<br /> <br /> <br /> <br />