Je suis l’hiver, de Ricardo Romero

Publié le par Yan

Jeune policier, Pampa Asiain a été muté dans le village de Monge, loin, bien loin de Buenos Aires. Appelé pour aller contrôler d’éventuels pêcheurs sans autorisation au bord d’un étang perdu dans l’immensité de la plaine qui entoure Monge, il trouve, pendu à un arbre le cadavre d’une jeune femme. Pampa devrait prévenir son seul collègue, le désagréable Parra, ou bien ses supérieurs. Mais, alors que commence à tomber la neige, il décide de n’en rien faire et de ne parler à personne de cette découverte. Veillant le corps, Pampa attend l’éventuel retour de celui qui l’a suspendu là car, de toute évidence cette fille a été assassinée. Cette attente sera pour lui l’occasion de revenir sur sa propre histoire et, peu à peu, de voir se révéler les secrets de la petite communauté qui vit à Monge et dans ses environs.

Je suis l’hiver est moins un roman lent qu’un roman qui prend son temps. Celui de décrire un paysage et une atmosphère dont le calme et l’immensité finissent par devenir oppressant et où le froid s’incruste partout, y compris au bout d’un moment chez le lecteur. Celui de creuser des personnages qui, malgré des trajectoires extrêmement différentes semblent tous naufragés ou proches de l’être, à commencer par Pampa Asiain qui charrie avec lui une histoire familiale dramatique à laquelle ce qu’il vit à Monge fait écho. Si c’est le jeune policier le personnage principal, celui dont la décision initiale de ne pas prévenir du crime qu’il a découvert lance l’intrigue, chaque chapitre viendra en ajouter un autre : la victime, ses proches, ses bourreaux. Et chacun d’entre eux verra son histoire racontée, sa personnalité révélée, ses actions et ses décisions, les bonnes comme les mauvaises, exposées, révélant par petites touches successives la manière dont le drame s’est noué.

Roman noir où le crime en lui-même intéresse moins que la manière dont il dévoile l’extrême solitude des personnages avec une crudité qui n’empêche pas une réelle poésie, Je suis l’hiver est un livre particulièrement touchant.

Ricardo Romero, Je suis l’hiver (Yo soy el invierno, 2017), Asphalte, 2020. Traduit par Maïra Muchnik. 203 p.

Publié dans Noir latino-américain

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