Le cannabis n’adoucit pas toujours les mœurs : Savages de Don Winslow
Ils sont inséparables. Ils, se sont Ben et Chon, jeunes entrepreneurs qui ont réussi dans le marché de l’hydro, le cannabis cultivé hors-sol, et Ophelia, leur amie qui a choisi de ne pas choisir entre les deux. Le trio inséparable est aussi éclectique. Ben, botaniste qui a mis au point une nouvelle espèce d’hydro qui a fait leur fortune, compense une certaine mauvaise conscience en se lançant dans des missions humanitaires aux quatre coins du monde. Ophelia, dite O, elle, serait plutôt du genre inconsciente et cherche avant tout à profiter de la vie sans contraintes. Quant à Chon, lui, sa conscience l’embarrasse peu. Membre des forces spéciales en Irak et en Afghanistan, il sait de quoi sont capables les hommes et a divisé le monde en deux catégories : les sauvages et ceux qui le sont un peu moins mais qui peuvent progresser avec un minimum d’efforts.
En attendant, tout va pour le mieux pour eux sous le soleil californien qui rend leur commerce si florissant. Jusqu’à ce qu’un cartel mexicain décide de faire main basse sur leur entreprise et, devant leur refus, enlève O. Dès lors, Ben et Chon vont devoir faire face à la sauvagerie de leurs adversaires et peut-être bien aussi passer la ligne qui fera d’eux des sauvages.
320 pages et 290 chapitres. Voilà qui peut donner une idée du rythme trépidant du dernier Winslow. Une écriture que l’on a vu naître chez cet auteur dans l’Hiver de Frankie Machine et qu’il a poursuivie dans La patrouille de l’aube. Elle atteint là, sans doute, son aboutissement et vous pousse à ne plus lâcher le livre jusqu’au dénouement final. Mais cela ne suffit pas à faire un bon roman. Don Winslow a, en plus, un talent certain pour camper en quelques lignes, parfois quelques mots, des personnages qui prennent chair, qui sont souvent stéréotypés de prime abord, mais attachants, et qui acquièrent au fur et à mesure de la lecture une épaisseur insoupçonnée. C’est le cas des héros comme de leurs adversaires et des personnages secondaires.
C’est comme cela qu’avec Savages Don Winslow nous offre à la fois un roman noir extrêmement efficace sans être dénué de fond et qui vient en quelque sorte compléter le monumental La griffe du chien par le biais de la thématique du trafic de drogue entre Mexique et États-Unis et de la violence qui lui est inhérente. C’est aussi une belle histoire d’amitié et, comme souvent chez cet auteur, ce n’est pas toujours dénué d’humour.
Un plaisir de lecture.
Don Winslow, Savages, Le Masque, 2011. Traduit par Freddy Michalski.
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Du même auteur sur ce blog : La patrouille de l'aube, La griffe du chien, Satori, L'heure des gentlemen ; Cool ; Dernier verre à Manhattan ; Cartel ; Corruption ; La Frontière ;