L’heure des gentlemen, de Don Winslow
Après La patrouille de l’aube, voici venu le moment de retrouver Boone Daniels le détective privé surfeur.
Alors que son amie Sunny est partie surfer aux quatre coins du monde et qu’il peine à passer le pas avec l’attirante avocat Petra Hall, Boone se cherche et s’aperçoit qu’il se rapproche de plus en plus de l’âge où il va devoir surfer avec les anciens de « l’heure des gentlemen ». Surtout que ses amis de la « patrouille de l’aube » vont sans doute peu apprécier le fait qu’il enquête pour le compte de la défense de Corey Blasingame, accusé d’avoir tué Kelly Kuhio, une légende locale du surf. De plus, l’enquête qu’il mène pour Dan, un des surfeurs de « l’heure des gentlemen » qui soupçonne son épouse de le tromper, le mine vraiment.
Le fond de ce nouveau roman de Don Winslow, c’est avant tout la crise de la quarantaine qui touche son héros. Boone Daniels vieillit, devient de moins en moins cool en voyant ce que devient le San Diego dans lequel il a grandit, et porte un regard de plus en plus critique sur sa propre vie. L’heure des gentlemen est un roman éminemment nostalgique sur une Californie et un sport, le surf, qui ne correspond plus que de loin à ce que Boone aurait aimé qu’ils restent ou deviennent. Car en fin de compte, le héros de Winslow est nostalgique d’une époque et d’un état d’esprit en grande partie fantasmés.
Le roman s’étire donc suivant cette langueur qui caractérise l’état d’esprit de Boone Daniels. Et les intrigues qui s’y entrecroisent ne sont là que prétextes à montrer combien le monde dans lequel évolue le héros non seulement à changé, mais n’a de plus jamais été celui qu’il aurait voulu qu’il soit.
Don Winslow mène donc sa barque avec une thématique proche de celle de L’hiver de Frankie Machine qui, déjà, fréquentait « l’heure des gentlemen », mais avec des intrigues à la fois plus complexes et plus faibles que celle qui était le fil de ce précédent roman. Cela donne en fin de compte un livre qui se lit assez facilement, avec quelque beaux passages, un suspens qui arrive à tenir le lecteur, mais qui manque singulièrement de fond et dans lequel les considérations philosophiques sur le surf qui semblent extraites des pires répliques de Patrick Swayze dans Point Break, surtout en début de roman, peuvent s’avérer agaçantes.
L’heure des gentlemen est un roman empreint d’une certaine naïveté dans la recherche désespérée d’un happy end typiquement américain qui viendrait conclure des intrigues inutilement emberlificotées. Ça se laisse lire mais on est loin de ce que Winslow nous a montré qu’il pouvait faire.
Don Winslow, L’heure des gentlemen (The Gentlemen’s Hour, 2009), Le Masque, 2012. Traduit par Frank Reichert.
Du même auteur sur ce blog : La patrouille de l'aube, La griffe du chien, Savages, Satori, Cool, Dernier verre à Manhattan ; Cartel ; Corruption ; La Frontière ; Entretien.