La Chasse, de Gabriel Bergmoser

Publié le par Yan

Frank a décidé de faire une croix sur un passé peu glorieux et la compagnie de ses congénères humains en achetant une station-service au fin fond du bush australien. Il y vivait une vie simple et ennuyeuse qui lui convenait plutôt bien jusqu’à ce que son fils se rappelle à son souvenir pour lui confier quelques semaines sa propre fille, Allie, quatorze ans et une petite crise d’adolescence en cours. L’homme et la gamine cohabitent dans un silence pesant jusqu’à ce matin où débarque dans la station une jeune femme grièvement blessée et, surtout, quelques heures plus tard, tout un tas de personnes peu amènes bien décidées à lui mettre la main dessus par n’importe quel moyen.

En commençant à lire La Chasse, on se dit qu’on a déjà lu et vu tout ça. On pense un peu à Mad Max, au Cul-de-sac de Douglas Kennedy, à Razorback et Wolf Creek… voire même à Alamo, Assaut ou à ce terrible nanard qu’est Maximum Overdrive. Autant dire qu’avec cette histoire de siège d’une station-service écrasée par le soleil et, en parallèle, celle qui a mené jusque-là Maggie, la jeune femme blessée, Gabriel Bergmoser emprunte des sentiers bien connus des amateurs de cinéma et de littérature de suspense, de western et d’horreur. Difficile dans ces conditions de faire quelque chose de bien singulier.

Et, de fait, on ne peut pas dire que La Chasse se démarque par son originalité. Par contre, le roman de Gabriel Bergmoser est terriblement efficace. L’auteur réussit à s’approprier les codes du genre, les archétypes des personnages – le vieux taiseux mystérieux qui prend mal le fait qu’on vienne le menacer, la jeune femme aux ressources insoupçonnées, l’adolescente plus maline qu’elle en a l’air, les clients innocents et les méchants ploucs vraiment très vicieux – et à offrir un roman sans temps morts dans lequel la tension ne se relâche jamais.

Mais aussi, embarqué dans ce récit, on se surprend à craindre pour Maggie tout en se demandant d’où lui vient cet instinct de survie, à s’interroger sur le passé de Frank. C’est qu’au-delà des archétypes et d’une histoire de série B efficace et divertissante, Gabriel Bergmoser a su conférer à ses personnages une véritable consistance qui rend son roman d’autant plus captivant. Bref, une réussite.

Gabriel Bergmoser, La Chasse (The Hunted, 2020), Sonatine, 2021. Traduit par Charles Recoursé. 249 p.

Publié dans Noir océanien

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