La Loterie et autres contes noirs, de Shirley Jackson

Publié le par Yan

Riche idée de la part des éditions Rivages que de publier ce recueil de nouvelles de Shirley Jackson après les romans Nous avons toujours vécu au château et La maison hantée.

Les treize textes présentés dans ce recueil forment en quelque sorte l’essence de l’œuvre de Shirley Jackson. Ils illustrent à merveille la manière dont l’écrivain savait en quelques pages instiller chez le lecteur une profonde sensation de malaise sans jamais user d’artifices trop voyants.

C’est que chez Shirley Jackson, l’angoisse et l’horreur naissent bien souvent de la banalité, de la vie quotidienne. Ainsi en va-t-il de ces vacanciers qui décident de prolonger leur séjour et se heurtent à une population locale qui estiment que la saison est terminée (Les Vacanciers), de cette enfant qui frappe chez sa voisine pour écouter ses disques (L’Apprenti-sorcier).

Il y aussi, avec un impressionnant sens de la chute la manière dont une apparente normalité vient créer le malaise dans la nouvelle-titre, La Loterie, où ce qui semble être une banale fête de village se transforme en tout autre chose, de bien plus inquiétant. Tout comme dans Paranoïa dans laquelle un homme pense être suivi : illusion ou réalité ? La fin nous le dira d’une manière on ne peut plus abrupte.

Shirley Jackson, par ailleurs, aime à pointer les travers de ses contemporains (La possibilité du mal) ou à les enfermer dans une folie qui tient à presque rien, à un détail, à une perception faussée, gauchie (Louisa, je t’en prie, reviens à la maison) et dont on ne sait de qui, parmi les personnages qui se confrontent, elle peut venir. Les monstres, chez Shirley Jackson, sont partout et, bien souvent, tapis dans l’esprit même des personnages qui en sont les victimes ou chez leurs proches.

On notera par ailleurs que la postface de Miles Hyman, talentueux dessinateur qui signe la couverture de cette édition et est, par ailleurs, le petit-fils de Shirley Jackson, apporte un éclairage érudit bienvenu sur ces nouvelles et, plus généralement, sur l’œuvre de l’auteur.

Shirley Jackson, La Loterie et autres contes noirs (Dark Tales, 2016), Rivages/Noir (2019). Traduit par Fabienne Duvignau. 251 p.

Du même auteur sur ce blog : La maison hantée ;

Publié dans Noir américain

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G
je viens de les terminer. Je suis bluffé par le sens de la chute que tu mentionnes et du style si efficace de l'auteur. J'avais aussi aimé la maison hantée.
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Y
Oui, elle est vraiment impressionnante !