Le fleuve caché, d’Adrian McKinty
À 25 ans, Alex Lawson est déjà un ancien flic. Démissionnaire après avoir trempé dans une affaire qui risque d’ébranler la police nord-irlandaise, il vit depuis chez son père, entre soirées quiz au pub local et shoots d’héroïne. Lorsqu’il apprend la mort aux États-Unis de Victoria Patawasti, sa première petite amie, et que le père de cette dernière, doutant que la police de Denver ait arrêté le bon coupable, lui demande d’enquêter sur ce meurtre, Alex voit le moyen d’échapper à la fois à la commission d’enquête qui voudrait le faire témoigner et à ses anciens collègues qui voudraient le faire taire. En se rendant dans le Colorado, il met pourtant les pieds dans une affaire qui risque de lui faire regretter les interrogatoires de la RUC et des émissaires de la commission d’enquête.
Roman paru entre deux aventures de Michael Forsythe (héros d’À l’automne je serai peut-être mort, du Fils de la mort et de Retour de flammes), Le fleuve caché se veut plus noir encore que ces dernières. Véritable descente aux enfers d’un jeune homme au jugement biaisé par la drogue et un certain complexe de supériorité, il est, de fait, un roman particulièrement sombre et glauque.
Après un départ plutôt lent dans lequel l’auteur prend le temps de bien camper ses personnages et se laisse aller à quelques considérations sur l’héroïne, l’Irlande… que l’on a déjà souvent eu l’occasion de lire par ailleurs, il trouve, à partir du moment où Alex débarque aux États-Unis, un rythme de croisière bien plus rapide avec des rebondissements à l’avenant.
La plongée d’Alex et de son ami John dans la ville de Denver, leurs considérations sur l’Amérique, valent à elles seules le détour. L’intrigue, quant à elle, qui voit Alex infiltrer une ONG qui sert de paravent pour le projet électoraliste d’un futur candidat aux primaires républicaines et se frotter à une femme fatale et mystérieuse, est bien plus classique et même sans grande surprise pour le lecteur qui a toujours plusieurs temps d’avance sur un Alex complètement déphasé.
Reste un roman bien mené avec des personnages dont McKinty s’attache à faire un portrait psychologique nuancé et une peinture originale de cette Amérique réactionnaire de l’intérieur où la sécheresse semble être moins redoutée que les mexicains et les homosexuels. On passe un moment de lecture agréable, parfois assez réjouissant, parfois un peu frustrant. Un bon polar auquel il ne faut pas en demander beaucoup plus1.
Adrian McKinty, Le fleuve caché (Hidden River, 2005), Gallimard, Série Noire, 2007. Traduit par Patrice Carrer.
Du même auteur sur ce blog : Une terre si froide ; Dans la rue j'entends les sirènes ; Retour de flammes ; La Chaîne ; Ne me cherche pas demain ; Ne me cherche pas demain ; Des promesses sous les balles ;
La fiche bibliométrique d'Adrian McKinty est ICI.
1 Et l'auteur de la chronique, qui classe par défaut McKinty chez les auteurs irlandais, de se demander aussi s'il a lu un roman américain écrit par un irlandais, ou un roman irlandais délocalisé aux USA. Les avis sont les bienvenus.