La Chaîne, d’Adrian McKinty
C’est peu dire que l’on attendait depuis longtemps le retour d’Adrian McKinty, porté disparu en France depuis la publication en 2013 de Dans la rue j’entends les sirènes, deuxième volet d’une série mettant en scène Sean Duffy policier catholique de la très protestante police d’Irlande du Nord, la RUC, au début des années 1980. Entre temps, McKinty a ajouté trois volumes à cette série, reçu un très bon accueil critique mais n’a pas vendu beaucoup de livres. Au point de finalement envisager d’abandonner l’écriture. Devenu chauffeur Uber, il a néanmoins finalement eu droit à sa part de rêve américain lorsque son agent lui a demandé de transformer une de ses nouvelles qui trainait dans un tiroir en un roman et que celui-ci, bénéficiant par ailleurs d’une amicale promotion de la part de Don Winslow, est devenu un best-seller et a été acheté – cher – par le cinéma. Ce roman, donc, c’est La Chaîne.
Rachel se remet tout juste d’un cancer du sein et commence à envisager un peu plus sereinement l’avenir après avoir trouvé un poste de professeur de philosophie. Mais alors qu’elle se rend chez son médecin après des analyses qui font craindre une récidive de la maladie, elle reçoit un coup de téléphone. Un couple vient d’enlever sa fille de treize ans, Kylie. Si elle veut la revoir, elle devra verser une rançon et, à son tour, enlever un enfant. Elle vient d’intégrer la Chaîne, mystérieuse organisation qui paraît omnisciente au fonctionnement extrêmement simple : la famille victime doit elle-même devenir criminelle pour sauver son enfant, créant une longue chaîne gouvernée par la terreur. Car si un seul chaînon échoue, l’enfant est éliminé.
Ce que propose donc Adrian McKinty avec La Chaîne, c’est un pur thriller qui se fonde sur un point de départ d’une rare simplicité : il suffisait d’y penser, en fin de compte, et il se trouve que c’est lui qui a eu cette bonne idée. On aurait pu plus mal tomber. Car si ce roman ne révolutionne pas foncièrement le genre, il bénéficie du savoir faire d’Adrian McKinty, un auteur qui sait maintenir le suspense et qui, par ailleurs, sait écrire (quand bien même il se laisse parfois aller ici à des petites tirades un peu emphatiques).
Bref, on se laisse facilement prendre au jeu pervers de La Chaîne, et c’est avec un plaisir non feint que l’on suit dans une première partie d’un côté les péripéties qui mènent à Rachel à devenir elle-même une criminelle pour sauver sa fille, et de l’autre les efforts de Kylie pour tenter d’échapper à ses ravisseurs. La deuxième partie du roman, elle, sera consacrée au désir de revanche de Rachel, à sa volonté de détruire la Chaîne. Elle se révèle tout aussi bien construite, même si le dénouement est quelque peu attendu.
Adrian McKinty, donc, nous offre là un thriller très calibré, fort bien fait et d’une assez redoutable efficacité. Un plaisir à ne pas bouder.
Adrian McKinty, La Chaîne (The Chain, 2019), Mazarine, 2020. Traduit par Pierre Reignier. 397 p.
Du même auteur sur ce blog : Le fleuve caché ; Une terre si froide ; Dans la rue j’entends les sirènes ; Retour de flammes ; Ne me cherche pas demain ; Des promesses sous les balles ;