Gianni Pirozzi nous parle de Stark, d'Edward Bunker

Après Christophe Dupuis et ses interviews, place à un nouvel invité en la personne de l'ami Gianni Pirozzi qui vient nous parler des livres qu'il aime. Et on débute sur les chapeaux de roues avec le grand Edward Bunker.
La grande classe !! Un récit de jeunesse sensuel et reptilien écrit vers 1963. Les démons de la came et de l'addiction superbement maîtrisés par une écriture au cordeau.
Stark est le portrait d'un jeune voyou héroïnomane sur la Côte Ouest. Sorti de prison il y a peu, Stark rêve de mettre en place son propre trafic d'héroïne et de s'enrichir rapidement. Pour cela, il séduit son entourage, ment et bluffe en permanence. Il manipule avec une aisance déconcertante et pratique l'intimidation. Il se fixe avec délectation et connaît parfois les affres du manque. A l'occasion, il cogne ses victimes et sort de temps à autre une arme à feu.
Bref, durant ses longues périodes d'incarcération à San Quentin, Bunker a écrit plusieurs romans tels que Stark au cours des années soixante. Tous furent refusés par les éditeurs avant qu'Eddie Boncoeur ne triomphe en 1973 avec Aucune Bête aussi Féroce et le soutien avisé de William Styron. Jamais publié du vivant de l'auteur, ce petit livre parfait, avec sa mécanique narrative impeccable et huilée, s'inscrit de manière idéale entre Aucune Bête aussi Féroce et Les Hommes de Proie.
"Lisez ce livre. Il vous donnera envie de faire la pute et de vous embourber de came", annonce James Ellroy dans la préface avec sa modération habituelle. Effectivement, Bunker porte un regard plein de mépris sur le monde de la rue, des putes, des camés et des arnaqueurs, mais également emprunt d'une vive intelligence clinique et non dénué d''empathie. Un roman noir poisseux et ophidien où Edward Bunker déploie son écriture de grand prédateur comme un serpent qui dénouerait ses anneaux avant de frapper. Un classique instantané.
Edward Bunker, Stark (Stark, 2006), Rivages/Thriller, 2008. Rééd. Rivages/Noir, 2010. Traduit par Freddy Michalski. 208 p.
On parle d'Edward Bunker sur le blog, ICI et on a chroniqué Évasion du couloir de la mort.