Tuer Jupiter, de François Médéline

Publié le par Yan

C’est un très napoléonien 2 décembre, en 2018, que le président de la République française, Emmanuel Macron, a droit à de grandes obsèques nationales et entre au Panthéon. Comment en est-on arrivé là ? De chapitre en chapitre, on remonte le temps et, d’un institut de thanatopraxie parisien à Moscou, en passant par l’Élysée, la Maison blanche ou Jérusalem, on découvre la manière dont le complot qui a mené à l’assassinat d’Emmanuel Macron s’est peu à peu mis en place.

Avec Tuer Jupiter, François Médéline propose moins une critique du pouvoir macronien qu’une fiction politique et sociale sur la puissance des réseaux sociaux et la désarmante, dangereuse et pathétique humanité des grands de ce monde. Trump, Poutine, Macron et tous ceux qui, en France, aspirent à prendre sa place après sa mort ne sont finalement, nous montre François Médéline, que des humains comme les autres, tiraillés par leur ego, menés avant tout par leur cerveau reptilien. Peut-être même, en fin de compte, puisqu’ils n’ont plus de limites, sont-ils plus pitoyablement humains que le commun des mortels. Et bien plus dangereux, donc.

Au fur et à mesure qu’il soulève toutes les couches, dont certaines ont fini par s’agglomérer, de ce mille-feuilles, pour donner à voir à rebours la mécanique faite presque autant de hasards – heureux ou malheureux selon où l’on se place – que de planification millimétrée de ce complot, Médéline saute d’un personnage à l’autre, tacle avec un plaisir visible un Gérard Collomb aussi retors que pathétique, se plaît à illustrer la vertigineuse mécanique de l’information en continue et des réseaux sociaux, s’immisce dans l’intimité des dirigeants du monde…

Tout cela, il le fait souvent avec panache, offrant au lecteur quelques véritables moments de grâce comme cette scène d’ouverture présentant la panthéonisation d’Emmanuel Macron et cette autre dans la tête de la thanatopractrice chargée du corps du président, et d’autres qui relèvent de la farce politique avec notamment un dialogue surréaliste entre Donald Trump et son plus jeune fils et une étonnante scène de massage pour Vladimir Poutine.

On pourra certainement regretter qu’entre ces moments de bravoure, par la faute d’une intrigue parfois trop tirée par les cheveux ou de passages où l’auteur sacrifie cette dernière à des hommages pas forcément nécessaires, on éprouve parfois la sensation de trous d’airs dans le roman ; comme avec ce braquage qui reprend à grand traits le style d’Ellroy en ouverture d’Underworld USA.

Pour autant, pour son propos autant que pour ses chapitres percutant par leur outrance, leur mécanique chirurgicale ou au contraire leur plongée dans l’intime, Tuer Jupiter vaut incontestablement que l’on s’y arrête et se révèle être un des romans particulièrement intéressants de cette rentrée.

François Médéline, Tuer Jupiter, La Manufacture de Livres, 2018. 223 p.

Du même auteur sur ce blog : La politique du tumulte ; Les rêves de guerre ; L'Ange rouge ; La sacrifiée du Vercors ;

Publié dans Noir français

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F
hello<br /> <br /> Trop superficiel ; pas habité ; pas fini de lire
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