Le Parker de Saint-Ouen : La récup’, de Jean-Bernard Pouy
En pleine rétrospective Parker, difficile de passer à côté d’une chronique à propos de La récup’, de Jean-Bernard Pouy.
« Le film est passé sur moi comme la Vierge sur Bernadette Soubirous ». Le film, c’est Point Blank, de John Boorman, avec Lee Marvin. Le « moi », c’est Antoine, aussi appelé Loulou, malfrat rangé des voitures, serrurier de son état. Mais la nécessité de s’acheter un nouveau tour de façonnage qui coûte les yeux de la tête le pousse à rempiler pour un dernier coup. Des Russes lui proposent dix mille euros pour ses services. Un coup simple et sans grand risque dans un manoir désert. Sauf qu’au lieu de le payer, ses commanditaires l’abandonnent pour mort sur un quai de gare après lui avoir injecté un cocktail détonnant d’héroïne, de cocaïne et de Canard WC (sans doute pour la couleur).
Et donc, comme Lee Marvin dans Point Blank, comme Parker dans Comme une fleur, Loulou va mettre un point d’honneur à se faire payer ses dix milles euros. Sauf qu’il ne sait pas dans quoi il met les pieds et qu’il a quand même encore un peu de boulot devant lui avant de devenir Lee Marvin.
Pas de surprise ici : Jean-Bernard Pouy fait du Jean-Bernard Pouy, et c’est tant mieux, parce que c’est du très bon Jean-Bernard Pouy. Une narration à la première personne par un personnage principal au caractère aussi fantasque que bien trempé, une affaire d’État de derrière les fagots, une langue fleurie et imagée, tout est là.
Et le plaisir du lecteur est là lui aussi, qui suit avec passion les tribulations de ce serrurier monomaniaque tout au long d’une histoire plus sérieuse qu’elle en a l’air. Un roman qui mérite qu’on s’y arrête.
Allez, pour terminer :
« Ça m’a énervé.
Le reste du monde avait oublié un truc, un petit détail.
J’étais Lee Marvin.
Buté, rageur, idiot, monomaniaque. Et suicidaire.
J’étais Lee Marvin et ça allait chier ».
Tout un programme.
Jean-Bernard Pouy, La récup’, Fayard Noir, 2009. Rééd. Points Roman noir, 2009.
Du même auteur sur ce blog : Nus ; Train perdu wagon mort ; Le bar parfait ; Ma ZAD ;