Jean-Michel de Brooklyn, de Marc Villard

Publié le par Yan

En 1983, à New York, Cécile poétesse dans la dèche vit avec Soler, peintre tout aussi fauché. Le couple a toutefois développé une manière originale de braquer les grands magasins, histoire de se renflouer un peu. Un casse réussi et un petit accident de circulation vont infléchir leurs trajectoires. Mike Brewer détective du magasin Global a repéré Cécile. Quand à Soler, il croise le chemin de Ruben Fonseca, dealer et arnaqueur qui le verrait bien peindre des fausses toiles du peintre qui monte alors, Jean-Michel Basquiat. Cécile, Soler, Ruben, Jean-Michel et Suzanne, son amie, autant de destins qui vont se croiser… pour le pire, essentiellement.

Ciseleur de nouvelles, Marc Villard tape plutôt ici dans la novella pour la collection Art Noir des éditions Cohen&Cohen. La plupart des thèmes qui lui sont chers sont cependant là : destins que les circonstances, les hasards de la vie, rendent tragiques, art, et description de quartiers à l’identité forte. En l’espace d’un peu plus d’une centaine de pages, Villard nous balade de l’hiver New Yorkais à la moiteur haïtienne, des galeries d’art huppées aux combats de coqs, et recrée une ambiance particulière faite d’urgence : l’urgence de créer à tout prix de Basquiat, celle de percer pour Cécile et Soler et de s’enrichir à tout prix pour Ruben. Dans le tourbillon de ce New York interlope où la bourgeoisie s’encanaille en frayant avec quelques artistes maudits et où les requins attendent leurs proies, les choses restent cependant ce qu’elles sont censées être. Ce ne sont ni les parvenus, ni les gros poissons qui vont subir et souffrir.

On suit tout ça avec intérêt, on s’instruit un peu au passage et surtout on prend une nouvelle fois plaisir à voir avec quelle maîtrise Marc Villard fait se croiser les chemins et les vies, sous l’œil d’un lecteur omniscient qui voit tout ce que les personnages ne voient pas eux-mêmes. Bref, un jeu auquel on prend part avec plaisir et, derrière tout cela, un beau portrait en creux de Jean-Michel Basquiat.

Marc Villard, Jean-Michel de Brooklyn, Cohen&Cohen, 2015. 121 p.

Du même auteur sur ce blog : Harmonicas et chiens fous ; La Fille des Abattoirs ;

Publié dans Noir français

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