Monumental : La Compagnie, de Robert Littell
Nous raconter près d’un demi-siècle d’histoire de la CIA à travers les destins de quelques personnages de fiction, voilà la gageure à laquelle s’est attaqué Robert Littell dans ce monumental roman. On suivra donc, de 1950 à 1991, le parcours de trois étudiants recrutés pour deux d’entre eux par la CIA et pour le troisième par le KGB.
De Berlin-Est à Moscou où un certain Boris Eltsine arrivé au pouvoir, en passant par Budapest, la baie des Cochons, le Vatican ou l’Afghanistan, on assiste aux manœuvres des deux camps pour faire bouger l’échiquier géopolitique mondial et à la traque d’une taupe bien infiltrée au sein de la CIA.
Robert Littell a été journaliste, ce qui explique sa connaissance aigue du sujet qu'il traite. C’est aussi un excellent romancier spécialisé dans les romans d’espionnage qui concernent la guerre froide (comme Ombres rouges) ou la situation en Palestine (Les enfants d’Abraham). Avec La Compagnie, il livre son grand-œuvre : plus de 1200 pages de manœuvres, de faux-semblants, de trahisons. Tout cela en respectant cet équilibre précaire entre les données géopolitiques et la vie de ses personnages qui lui permet d’éviter le didactisme à outrance et rend son roman passionnant.
Il serait exagéré de dire que l’on ne voit pas passer le temps quand on lit La Compagnie. Pour la simple raison qu’on ne peut pas lire d’une traite cet énorme pavé. Par contre, quand on se voit obliger de le poser car on doit aller travailler ou dormir, on n’attend plus qu’une chose : le retrouver au plus vite.
Imposant et magistral, La Compagnie est sans aucun doute un des meilleurs romans d’espionnage qui ait jamais été écrit.
Robert Littell, La Compagnie : le grand roman de la CIA, Buchet/Chastel, 2004. Rééd. Points 2004 et Points Policier 2011. Traduit par Nathalie Zimmermann.
Du même auteur sur ce blog : Philby. Portrait de l'espion en jeune homme.