Saturne, de Serge Quadruppani
Quand un tueur débarque dans un centre de cure thermale en Toscane et tue trois personnes au hasard, les soupçons ont tôt fait de se tourner vers al-Qaida ou la mafia. Pourtant, alors que le G8 se réunit justement en Italie pour parler de la crise économique, cette tuerie pourrait être liée à un autre genre de terroristes. C’est sur cela que Simona Tavianello, commissaire antimafia, et Cédric Rottheimer, privé français témoin du drame et engagé par les familles des victimes et par le tueur lui-même pour retrouver les commanditaires, vont tenter de faire la lumière.
On connaissait Serge Quadruppani traducteur de Giancarlo de Cataldo ou de Valerio Evangelisti (non, je n’ai toujours pas lu un seul roman d’Andrea Camilleri – mea maxima culpa) mais on avait encore jamais lu un de ses romans. Voilà donc un oubli, parmi tant d’autres, de réparé. Avec plaisir qui plus est. Car Serge Quadruppani écrit avec Saturne un beau roman sur l’incompréhension du citoyen face à ce qui peut se passer dans des sphères auxquelles il n’a pas accès et qui, pourtant, déterminent en grande partie sa vie au quotidien et agitent l’actualité : hautes sphères politiques et officines que l’on a coutume de croiser dans ce genre de roman, et hautes sphères économiques.
Il ne faut cependant pas s’attendre à un de ces épais et parfois abscons romans d’espionnage bourrés de complots et d’une multitude de personnages aux motivations obscures. Car Quadruppani ne place que peu ou pas son regard au niveau de ce qui dirigent et manipulent, mais plutôt à la hauteur de ceux qui se trouvent empêtrés dans ces manipulations ou qui en sont les victimes.
En instillant action, fantaisie et cuisine dans ce canevas, Serge Quadruppani nous donne sa vision de notre époque et de notre société, et si au fond l’histoire qu’il nous conte est bien noire, cette manière de la raconter lui donne un aspect de joyeuse révolte. C’est enlevé, sombre mais pas dénué d’optimisme et de joie de vivre… bref, malgré le sujet, voilà un roman revigorant.
Serge Quadruppani, Saturne, Le Masque, 2010. Rééd. Folio Policier, 2012.
Du même auteur sur ce blog : Colchiques dans les prés ; La disparition soudaine des ouvrières ; Madame Courage ;