Mauvais fils, de George Pelecanos
Thomas Flynn aurait voulu que son fils, Chris, soit meilleur que lui. Mais, malgré une enfance passée dans un quartier plutôt huppé, avec des parents attentionnés, Chris est devenu une petite frappe égoïste jusqu’à atterrir dans une prison pour mineurs. À sa sortie, embauché avec un de ses anciens codétenus dans l’entreprise de pose de moquette de son père, Chris tente de s’amender. Et puis un jour, sous le parquet d’une maison dans laquelle ils travaillent, Chris et son ami Ben découvrent un sac contenant 50 000 dollars. Un argent qui doit bien appartenir à quelqu’un qui aura sans doute très envie de le récupérer.
Revoilà donc George Pelecanos pour une nouvelle chronique de la vie à Washington et des contradictions qui tiraillent les hommes. C’est toujours avec un certain plaisir que l’on retrouve cet auteur fin et son regard aigu et bienveillant sur sa ville et ses habitants. C’est que Pelecanos à ce don de vous embarquer tout au long de quatre cents pages dans une intrigue qui aurait pu tenir en cinquante grâce à sa capacité à vous attacher aux personnages et à instiller tout doucement juste assez d’action et de suspense pour vous donner envie de continuer à tourner les pages pour connaître le fin mot de l’histoire.
Et, de fait, cela fonctionne toujours avec Mauvais fils. Toutefois, peut-être trop à l’aise avec sa recette, Pelecanos tend à nous la resservir à chaque fois en se contentant d’en changer un peu l’assaisonnement. On y trouve de moins en moins de sel, mais de plus en plus de sucre. Cela donne des personnages attachants, certes, dont les portraits sont plutôt bien brossés, mais qui manquent de plus en plus de ces zones d’ombres qui donnaient cette épaisseur à un Nick Stefanos, un Peter et un Dimitri Karras, un Derek Strange ou un Terry Quinn.
Et, depuis quelques temps (depuis Les jardins de la mort, pour moi), l’impression est tenace de lire toujours plus ou moins la même histoire de braves gars qui ont fait une bêtise et passent leur vie à essayer de l’expier avec des accents de plus en plus mélodramatiques.
Alors, oui, Mauvais fils est un bon roman et, sans doute, de ces livres qui se placent sans problème au-dessus du gros de la production en terme de qualité et de profondeur.
Reste que George Pelecanos nous a pourtant habitué à mieux et nous a rendu peut-être plus exigeant. Voilà un roman qui nous fait passer un agréable moment de lecture mais qui, pour moi, manque de cette bande-son qui nous faisait vibrer, de héros vraiment borderline, d’une peinture plus acerbe et plus aigue de Washington et de ses habitants. La sauce est encore bonne mais elle prend un peu moins bien. Espérons que la nouvelle série annoncée avec un héros enquêteur vétéran de la guerre en Irak et la reprise des aventures de Derek Strange nous permettrons de retrouver cette fougue qui nous avait séduits à la lecture de Funky Guns ou de Blanc comme neige.
George Pelecanos, Mauvais fils (The Way Home, 2009), Seuil Policiers, 2011. Rééd. Points Policier, 2012. Traduit par Étienne Menanteau.
Du même auteur sur ce blog : Une balade dans la nuit ; Le double portrait ; Red Fury ;