Chandelles noires, de John Le Carré
Carne, prestigieuse public school anglaise, est le théâtre d’un meurtre sordide. Stella Rode, femme de l’un des professeurs de l’établissement a été assassinée. Peu avant sa mort, elle avait envoyé une lettre à La voix chrétienne, bulletin de la bonne société anglaise, dans laquelle elle indiquait craindre que son mari veuille la tuer. Miss Brimley, rédacteur en chef du périodique prend alors contact avec George Smiley, agent de renseignement avec lequel elle a travaillé durant la guerre. Et Smiley de proposer ses services à la police locale et de fureter dans le milieu compassé de Carne.
Cette réédition d’un roman paru dans l’éphémère collection Panique de Gallimard en 1963, est l’occasion de découvrir ou redécouvrir George Smiley[1], héros de la célèbre trilogie de Karla (La Taupe, Comme un collégien, Les gens de Smiley). Point d’espionnage ici cependant, mais un très classique whodunit, roman à énigme, dans lequel l’enquêteur par la force de son esprit de déduction réussira à faire la lumière sur le crime commis et à confondre le coupable. Un exercice de style auquel Le Carré ajoute une peinture acide de la haute société anglaise de ce début des années 1960 et de ces écoles privées qui forment l’élite dans un environnement clos aux règles rigides et souvent archaïques.
C’est sans doute là tout l’intérêt de ce roman qui apparaît aujourd’hui tout aussi poussiéreux que le milieu qu’il décrit. Avançant au rythme d’un Smiley décrit par l’auteur comme un crapaud, furetant de ci de là et se lançant dans de longues discussions avec tous les suspects potentiels, Chandelles noires se révèle souvent fastidieux à lire pour qui ne s’intéresse pas particulièrement à la face cachée des relations entre professeurs de pensionnats anglais, c’est-à-dire – du moins peut-on l’espérer – la grande majorité de la population, malgré quelques passages où l’ironie de Le Carré point clairement.
On se contentera donc de conseiller l’ouvrage aux aficionados du whodunit britannique et aux inconditionnels de Le Carré, puisque même les vieux lecteurs libidineux n’apprendront rien sur les légendaires relations intimes entretenues par les étudiants dans les maisons qui les accueillent.
John Le Carré, Chandelles Noires (A Murder of Quality, 1962), Gallimard, 1963. Rééd. Folio Policier, 2013. Traduit par Maurice Rambaud et Marcel Duhamel.
Du même auteur sur ce blog : Un traître à notre goût.
[1] Il s’agit en fait du deuxième roman de John Le Carré ; le deuxième aussi dans lequel apparaît Smiley, après L’appel du mort.