Simple mortelle, de Lilian Bathelot
On a découvert ici Lilian Bathelot avec Terminus Mon-Ange, roman noir extrêmement resserré et, déjà, mâtiné de romance. Plus ample, dans sa narration comme dans la longueur de l’intrigue, Simple mortelle mérite lui aussi que l’on s’y arrête.
Mère de trois enfants déjà grands qu’elle ne voit que très peu, divorcée, Nicole a passé le concours de professeur des écoles sur le tard. Assez mal classée, elle se retrouve, par le jeu des mutations, affectée à la classe unique de Malissègre, dans les Corbières audoises. Dans cette espèce de bout du monde, elle rencontre l’énigmatique et troublant Louis Lacan dont elle tombe très vite amoureuse. C’est le récit de cette histoire, à la première personne, qui ouvre le roman de Lilian Bathelot. Récit vite interrompu par différents allers-retours entre passé et présent et entre divers personnages secondaires. De ce que l’on comprend assez vite, Louis a trouvé dans ces montagnes un refuge, un paysage immuable dans lequel se fondre. Mais l’immuabilité même des lieux est remise en cause par un projet de barrage.
Simple mortelle est donc avant tout le récit de la rencontre de deux solitudes, une histoire d’amour dont on sent très vite qu’elle est aussi puissante que remplie de non-dits. Mais au-dessus de cette histoire plane une sourde menace. Raison d’État, besoin impératif de sauver la face… on appellera cela comme on veut, mais Louis devient une cible pour des personnes puissantes et, surtout, un coupable idéal. L’histoire d’amour se suffirait-elle à elle-même ? Peut-être. Lilian Bathelot, c’est incontestable, sait la mener avec ce qu’il faut de finesse et de crudité. Mais l’intrigue qui tourne autour de la façon dont s’organise en parallèle l’opération destinée à briser Louis ne la rend que plus urgente et intense, propulsant à la fois Nicole et le lecteur dans un tourbillon à la fois grisant et menaçant.
Si l’on pourra peut-être regretter qu’autour de ces deux principaux protagonistes, ceux qui participent à l’écroulement annoncé ne soient pour la plupart qu’esquissés et rejoignent un ballet d’ombre qui, sans pour autant lever tout mystère, aurait certainement pu être un peu plus étoffé, il n’en demeure pas moins que l’on trouve dans Simple mortelle un roman charnel et noir d’une belle violence.
Lilian Bathelot, Simple mortelle, La Manufacture de Livres, 2018. 440 p.
Du même auteur sur ce blog : Terminus Mon-Ange ;