Les mois d’avril sont meurtriers, de Robin Cook
En même temps qu’elle inaugure une nouvelle maquette, la collection Folio Policiers se lancent dans la réédition de « polars cultes » issus de son fonds. Sans surprise, l’un des premiers titres concernés est Les mois d’avril sont meurtriers, du défunt et, donc, culte Robin Cook. L’occasion de découvrir ou redécouvrir ce deuxième volet de la série consacrée à l’Usine, commissariat dans lequel exerce, au service des décès non éclaircis, le narrateur, sergent de police désabusé mais animé malgré tout d’un sens aigu de la justice et d’une véritable empathie pour les victimes. La victime, ici, est un indic minable dont a retrouvé le cadavre bouilli dispersé dans quatre sacs. Le coupable, lui, est très vite connu. McGruder, ancien militaire et tueur à gages psychopathe, a cependant pour lui de ne laisser que peu de preuves et encore moins de témoins après avoir accompli son travail. S’engage alors entre le sergent et le tueur un combat psychologique, un face à face aussi déstabilisant pour l’un que pour l’autre. Car si McGruder souffre des vérités que lui assène le policier, ce dernier, écrasé par une douleur intime, en combat permanent contre lui-même et contre l’institution et d’une certaine manière fasciné par le tueur, est aussi mis à rude épreuve.
C’est bien à cette opposition, ainsi qu’aux passages relatifs à la vie du policier-narrateur, que tient l’intérêt du roman. Robin Cook crée ainsi une ambiance pesante, plombante même, et met en scène un duel moral plus que physique dans lequel la tension est permanente. Il y a par ailleurs dans l’ambivalence de la relation qui se tisse entre le flic et le tueur un fascinant jeu de répulsion et de séduction. Il y a enfin la construction d’un personnage – ce sergent que la vie n’a pas épargné – sur le fil, qui apparaît successivement solide comme un roc ou sur le fil, prêt à basculer.
On pourra regretter deux choses toutefois. Une traduction qui a bien mal vieilli, tout d’abord. L’imbrication dans l’enquête d’une deuxième intrigue tournée vers l’espionnage qui vient indéniablement parasiter l’histoire sans y apporter quoi que ce soit ensuite.
Ces réserves posées, il n’en demeure pas moins que Les mois d’avril sont meurtriers est un de ces romans qui méritent que l’on s’y arrête et qui, sans être parfaits, révèlent quelques belles facettes noires.
Robin Cook, Les mois d’avril sont meurtriers (The Devil’s Home on Leave, 1984), rééd. Folio Policiers, 2015. Traduit par Jean-Bernard Piat. 319 p.