The Shield, saison 1

Publié le par Yan

The.Shield.02.jpgEn 2001 éclate le scandale de la Rampart division. On découvre que dans ce commissariat de Los Angeles, les membres d’une brigade anti-gangs ont, durant les années 1990, détourné de la drogue saisie par la police, participé à des braquages, falsifié des preuves, et sans doute même participé à des assassinats. Ils auraient notamment été liés aux meurtres des rappeurs  2Pac et Notorious Big (sur ce point, le lecteur qui ne souffre pas d’allergie aux titres sous forme de mauvais calembours pourra se référer au bon bouquin de Randall Sullivan, L.A. Byrinthe, aux éditions Rivages/Rouge).

C’est cette affaire qui inspire au départ la série The Shield dont la première saison est diffusée à partir de 2003 : la « Strike Team », unité anti-gang affectée au commissariat du quartier imaginaire de Farmington, à Los Angeles, menée par Vic Mackey, détourne de la cocaïne, émarge auprès de producteurs de rap liés à certains gangs du quartier, chapeaute le trafic de drogue, use de violence vis-à-vis des criminels…

Cette saison s’ouvre sur un acte qui enclenche un torrent d’événements qui se poursuivra jusqu’à la septième et ultime saison. Ce à quoi le spectateur est convié, c’est à l’inéluctable déchéance d’une Strike Team qui choisit la fuite en avant.

The Shield, en anglais, c’est le bouclier, mais aussi l’insigne de la police. Un bouclier censé protéger la population, mais qui sert aussi à couvrir ceux qui le portent. Si Mackey et ses hommes couvrent leurs méthodes en arguant du fait qu’ils assurent malgré tout la sécurité des habitants du quartier, ils entendent bien profiter de la protection que leur apporte leur insigne pour prospérer.

C’est là le point sur lequel se concentre la série : la frontière étroite et poreuse entre le criminel et celui censé le pourchasser, la corruption financière et morale, les petits arrangements qui finissent par devenir des chaînes à traîner, la façon dont on peut tordre la morale pour justifier ses actes. Certes des sujets plus larges sont abordés : tensions raciales, spéculation, les violences conjugales… mais The Shield n’est pas une série qui aborde de front l’angle sociétal des choses ; il s’agit plutôt d’une formidable étude de caractères.

Chaque épisode permet de donner un peu plus d’épaisseur aux personnages : le salaud fait une bonne action, le bon commet un acte odieux, et le spectateur de se trouver partagé, confronté à des personnages dont on ne peut pas dire qu’ils soient bons mais dont il est clair que leurs motivations sont autrement plus complexes que ce qu’il peut sembler au premier abord. Mackey se veut un bon père de famille, montre de l’empathie vis-à-vis des autres mais n’hésite pas à user de la violence, jusqu’au meurtre, pour se protéger. Le capitaine Aceveda, déterminé à faire tomber Mackey, n’est pas un chevalier blanc mais un politicien déterminé à se faire élire et capable de s’allier à son ennemi pour faire avancer ses projets… Entre eux, les deux duos de policiers formés par les détectives Claudette Wyms et Dutch Wagenbach et les agents Danny Soffer et Julian Lowe, apparaissent, sans préjuger de leurs parts d’ombres qui existent aussi et se dévoilent parfois, comme des bouées, des fragments d’honnêteté, auxquels viennent s’accrocher à tour de rôle Aceveda ou Mackey, pour faire le bien, s’extraire un moment des bas-fonds moraux dans lesquels ils traînent (et qui explosent parfois symboliquement comme dans cet épisode où la canalisation des toilettes éclate et inonde le commissariat), ou pour mieux tenter de les utiliser. Car si Mackey et Aceveda revendiquent leur désir de faire le bien pour la population de Farmington, ce sont bien Claudette, Dutch, Danny et Julian qui sont véritablement auprès des victimes et qui officient pour quelqu’un d’autre qu’eux-mêmes.

Résolument noire et dérangeante, la première saison porte aussi son lot de scènes qui désamorcent quelque peu la tension par le biais de l’humour : quelques affaires cocasses, quelques blagues potaches ou les errances morales de Shane, le fidèle adjoint de Mackey, tout en dents blanches et en impulsivité et crétin patenté. Il n’en demeure pas moins qu’en fin de compte, lors du dernier épisode, les premiers dégâts sont là : un quartier ravagé, des familles brisées… La fuite en avant commence vraiment, et elle n’est pas près de s’arrêter.

Voir aussi : The Shield, saison 2 ; The Shield, saison 3.

Publié dans Séries

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