Hot Spot, de Charles Williams
Après Le Bikini de diamants, les éditions Gallmeister poursuivent leur cycle de retraduction, de romans de Charles Williams avec Hot Spot, publié en France, à la Série Noire, en 1955 sous le titre de Je t’attends au tournant. On est là dans la veine plus noire et cynique de Charles Williams qui raconte l’histoire de Madox.
Cet ancien marin, volontiers bagarreur et assez fier de lui, a fini par échouer dans une petite ville texane où il officie – avec succès – comme vendeur de voitures d’occasion. Mais Madox n’est pas homme à se contenter de peu, ni à vouloir traîner trop longtemps dans un patelin peuplé de gens qu’il considère comme les derniers des ploucs. C’est d’ailleurs dans cette vision des autres et dans son arrogance que réside sa faute initiale. Persuadé de pouvoir berner tout le monde, sûr de son pouvoir de séduction et d’intimidation, Madox, qui n’a pas besoin d’être beaucoup poussé pour cela, se laisse aller à la facilité. Récupérer une dette et prendre sous son aile la jeune et timide Gloria Harper dont il pense qu’il peut aisément la séduire ? Facile. Coucher avec la femme du patron qui semble très attirée par lui ? Pas de problème. Braquer la banque de la ville, fort mal surveillée ? Un jeu d’enfant.
Sauf que, bien entendu, le mâle dominant, le potentiel prédateur, va peu à peu s’apercevoir que l’environnement lui est en fait beaucoup moins favorable que ce qu’il pouvait penser et que les faiblesses de ses proies potentielles ne sont qu’apparentes.
C’est une fois qu’il ne peut plus reculer que Madox se rend compte du carcan dans lequel il s’est enfermé. Dans ce récit à la première personne, on le voit donc s’engager dans toutes les impasses qui se présentent devant lui avec une confiance qui force le respect mais qui ne va faire que s’effriter au fur et à mesure que les solutions qu’il trouve se révèlent inefficaces, l’obligeant à une fuite en avant de plus en plus erratique.
Charles Williams malmène ainsi terriblement son personnage qui devient de plus en plus à la fois pathétique et antipathique. Pas loin de soixante-dix ans après son écriture, Hot Spot n’a pas pris une ride. Acide à souhait, servi par des rebondissements constants qui mènent à une fin aussi noire que réjouissante, il méritait bien cette nouvelle traduction qui lui permettra, on l’espère de trouver un nouveau – et large – public.
Charles Williams, Hot Spot (The Hot Spot, 1953), Gallmeister, coll. Totem, 2019. Traduit par Laura Derajinski. 222 p.
Du même auteur sur ce blog : Le bikini de diamants ;