Zigzag, de Ross Thomas

Publié le par Yan

Inaugurée si je ne m’abuse avec Les portes de l’Enfer, de Harry Crews, la collection Sonatine + qui permet de republier des ouvrages malheureusement épuisés comme Le Condor, de Stig Holmås, ou des inédits d’auteurs auréolés du statut – peut-être discutable, mais pratique – de « cultes », est une riche idée. Et ce Zigzag, de Ross Thomas, auteur publié précédemment à la Série Noire puis chez Rivages (on a vu pire comme CV), vient confirmer la pertinence de ce choix éditorial.

Commençons par avouer notre ignorance de l’œuvre de Ross Thomas dont a pourtant souvent entendu parler en bien. Mais les livres étant nombreux et la vie bien courte nous n’avions pas encore eu le temps de nous y intéresser. Et voici donc Zigzag, inédit que publie Sonatine +. CQFD.

Nous rencontrons donc ici Artie Wu et Quincy Durant, que les lecteurs fidèles de Ross Thomas connaissent déjà. Issus du même orphelinat, les deux hommes sont des aventuriers doublés d’escrocs de haut vol, qualités qui leurs valent d’ailleurs de travailler épisodiquement pour des officines des services secrets. En cette fin des années 1970, Wu et Durant sont installés sur la côte sud de la Californie. Dans leur collimateur, Randall Piers, multimillionnaire que les deux aigrefins vont appâter à l’aide d’un pélican mort, de bon café et d’une carte au trésor. Démarre alors une histoire où s’entremêlent corruption, Mafia et sur fond de projet immobilier pharaonique, dans laquelle nos deux héros espèrent bien tirer leur épingle du jeu et repartir bien plus riches qu’en arrivant.

Incontestablement, le charme du roman de Ross Thomas tient d’abord à ses deux personnages principaux. Incroyablement sûrs d’eux, extrêmement organisés, dotés d’un humour pince-sans-rire mais aussi dotés de parts plus sombres et même de quelques cicatrices jamais complètement refermées, Wu et Durant attirent la sympathie. Les personnages qui gravitent autour de ces deux aigrefins de talent valent aussi le détour et Ross Thomas se plaît d’évidence à monter cette galerie de mafieux, barbouzes, fausses voyantes, policiers et politicards et à agiter le tout en y ajoutant une bonne dose de dialogues bien balancés et un regard d’un cynisme amusé sur cet échantillon d’humanité. Cela donne, enchâssées dans une histoire assez complexe il est vrai, un certain nombre de scènes étonnantes et parfois hilarantes dans lesquelles l'auteur réussit à allier action, humour et suspense. Autant dire que l'on s'y laisse facilement prendre.

Enlevé, accrocheur et piquant, Zigzag est un roman qui méritait bien d’être enfin traduit et dans lequel on plonge avec un plaisir évident.

Ross Thomas, Zigzag (Chinaman’s Chance, 1978), Sonatine, 2016. Traduit par Patrick Raynal. 478 p.

Publié dans Noir américain

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F
J'ai souvenir avoir lu, il y a fort longtemps, "Faisans des îles" (traduit par J.P Manchette) du sieur Ross Thomas et un autre dont le titre m'échappe ! Ton billet a fait remonter des souvenirs et m'a donné l'envie de tenter ce "Zigzag" ... Merci à toi ! ;-)
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Y
Il y a aussi Voodoo Ltd, chez Rivages. En tout cas, je vais les sortir de ma bibliothèque.