Une fleur en enfer, d’Alper Canigüz

Publié le par Yan

Une fleur en enfer marque le retour d’Alper Kamu, cinq ans, lecteur de philosophe, cynique, désespéré par la vie (« Je comprends la vie, seulement, je ne parviens pas à m’y résigner ») et enquêteur hors pair. Ici, Alper se trouve confronté à deux mystères. D’abord la mort de son oncle qui semble avoir vécu un amour déçu et/ou impossible, ce qui ne peut que toucher l’enfant qui tend à tomber amoureux de toutes les femmes qu’il croise. Ensuite celle du fils handicapé d’une drôle de famille qui vient de s’installer dans son quartier décrépit d’Istanbul. Et puis il y a bien sûr les tensions diplomatiques qui règnent entre les enfants du pâté de maison et ceux du quartier voisin qui pourraient tourner à la guerre ouverte…

On a déjà dit ici le plaisir que l’on avait eu à découvrir Alper Kamu avec L’assassinat d’Hicabi Bey. Il en va de même avec Une fleur en enfer dans lequel on retrouve les séduisants ingrédients du premier roman d’Alper Canigüz : un regard mordant sur la société turque, un sens aigu du décalage, de et une atmosphère oscillant entre la fable humoristique et le conte pessimiste.

Et si l’on peut toujours rester de prime abord circonspect face à ce narrateur de cinq ans à l’éloquence d’adulte, Canigüz parvient néanmoins à le rendre presque crédible en l’affligeant plus encore que dans son précédent roman de caractéristiques propres aux enfants de cet âge. Ainsi le voit-on s’endormir en pleine enquête à l’heure de la sieste, avoir le béguin pour toute les jeunes adultes qui lui portent de l’attention et, surtout, se prendre à rêver entre deux investigations, sur une magnifique voiture à pédales. Ce sont ce décalage constant, cette capacité à enchaîner les situations cocasses et les aphorismes cyniques de son personnage et ce portrait ciselé de la société stambouliote qui, une fois encore, permettent à Alper Canigüz d’attraper le lecteur pour ne plus le lâcher.

Alper Canigüz, Une fleur en enfer (Alper Kamu Cehennem Çiceği, 2013), Mirobole Éditions, 2015. Traduit par Alessandro Pannuti. 256 p.

Du même auteur sur ce blog : L’assassinat d’Hicabi Bey ; L'Agence Secrète ;

Publié dans Noir du Moyen-Orient

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