Une affaire d’hommes, de Todd Robinson
Todd Robinson fait partie des auteurs qui ont essuyé avec succès les plâtres de la collection Néo Noir de Gallmeister. On n’est donc pas étonné de le retrouver aujourd’hui avec ses deux héros bas-de-plafond. Boo et Junior officient toujours comme videurs dans le pas du tout select club qu’est le Cellar. Boîte accueillant punks, néonazis et autres alcooliques chroniques, le Cellar est finalement un petit paradis pour Boo et Junior qui peuvent ainsi s’adonner à leur divertissement favori : taper des gens en essayant de ne pas se faire briser les os. On s’amuse comme on peut.
Sollicités par leur collègue Ginny pour aller toucher deux mots – et éventuellement quelques mandales – à l’ex un peu lourdingue de son colocataire, les deux portiers se trouvent bien vite entraînés dans une histoire qui les dépasse puisque ledit amant éconduit et retrouvé mort après leur visite.
On passera sur les détails de cette histoire alambiquée, pas toujours très crédible et dans laquelle, assez vite, on a arrêté d’essayer de suivre l’intrigue. Comme dans Cassandra, premier volume de cette série, il paraît assez évident que la cohérence de l’histoire n’est pas le souci premier de Todd Robinson. Ce qui motive l’auteur, c’est avant tout de s’amuser avec ses personnages, de les martyriser un peu et de placer dans leurs bouches des répliques hilarantes et, pour donner un semblant d’épaisseur au tout, de traiter avec humour – ce qui n’empêche pas d’être sérieux – la question de l’homophobie.
Bref, on trouvera dans Une affaire d’hommes les mêmes ingrédients que dans le volume précédent : des bastons épiques, des bons sentiments à la pelle, des dialogues amusants et des situations rocambolesques. On pense nécessairement à une version littéraire des « buddy movies » des années 80-90. C’est efficace, extrêmement divertissant, très rythmé, bourré de personnages étonnants qui frôlent la caricature. Autant dire que l’on a peu l’occasion de s’ennuyer à la lecture de ce roman qui relève certainement de la littérature « pulp ». On le lit vite, on oublie tout aussi rapidement les détails de l’intrigue, mais on se souvient de ses personnages déjantés et de quelques scènes particulièrement gratinées. Le prix Nobel de littérature a de toute évidence assez peu de chances d’échoir à Todd Robinson, mais il est indéniable que ce dernier est au courant de son statut d’outsider en la matière et qu’il n’a d’autre ambition que de faire passer un bon moment au lecteur. De ce point de vue, c’est plutôt réussi.
Todd Robinson, Une affaire d’hommes (Rough Trade, 2016), Gallmeister, 2017. Traduit par Laurent Bury. 364 p.
Du même auteur sur ce blog : Cassandra ;