Cassandra, de Todd Robinson

Publié le par Yan

« Junior se dirigea vers eux à grands pas, la colère lui donnait un coup de soleil irlandais.

-Je vais te tuer et t’enculer après, tapette !

Je n’étais pas sûr que Junior pensait ce qu’il disait, mais je lui emboîtait le pas.

-Ouais, il est pas gay, c’est juste qu’il aime enculer les morts.

Dans les grands rétroviseurs, je vis la peur sur le visage de Mulet. Tout à coup, il se pencha pour ramasser quelque chose. J’étais à peu près sûr que ce n’était pas un chaton. »

Ainsi va la vie pour Boo et Junior, videurs du Cellar, boîte miteuse de Boston, et pas vraiment des prix Nobel de la Paix. Jusqu’au jour où les deux amis inséparables depuis l’orphelinat sont contactés par le procureur de la ville qui voudrait récupérer discrètement sa fille fugueuse. Dès lors, leur vie pas vraiment fabuleuse va devenir carrément dégueulasse.

Punchlines bien posées, scènes de bagarres épiques, Cassandra fonctionne avant tout à l’énergie. Pas dénué de défauts, en particulier une cohérence pour le moins superficielle de l’intrigue et la sensation que l’auteur semble parfois se sentir obligé de faire entrer dans son livre tous les clichés inhérents au genre (la blessure secrète du héros, l’histoire d’amour, le dilemme moral, les retournements de situation de dernière minute…) au risque d’enlever un peu d’âme à l’ensemble, le roman de Todd Robinson n’en est pas moins un très honnête divertissement. Certainement parce qu’il a aussi les qualités de ses défauts : en usant efficacement des poncifs de ce genre de roman noir un peu déjanté qui semble lorgner ostensiblement du côté des duos d’enquêteurs à grandes gueules plongés dans des histoires sordides, des Hap et Leonard de Lansdale aux Kenzie et Gennaro de Lehane en passant les Cole et Pike de Robert Crais, il assure au lecteur un récit qui, à défaut d’être très original, se révèle au moins sans mauvaise surprise.

Bien fait, bien rythmé, parsemé de moments  jubilatoires comme l’interrogatoire musclé d’une hippotamesque gérante boutique de location de films, de running gags bien trouvés (le taser !) et de personnages secondaires aussi invraisemblables qu’amusants, Cassandra est une de ces séries B efficaces et réjouissantes qui ne concourent pas pour le prix du roman de l’année mais assument leur mission de divertissement bien balancé.

Todd Robinson, Cassandra (The Hard Bounce, 2013), Gallmeister, coll. Néo Noir, 2015. Traduit par Laurent Bury. 380 p.

Du même auteur sur ce blog : Une affaire d'hommes ;

Publié dans Noir américain

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L
J'adore cette maison d'édition et cette collection, il faut que je le lise :)
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