Tueur de bisons, de Frank Mayer

Publié le par Yan

tueur-bisons gC’est encore un curieux livre qu’édite Libretto. Récit de vie du dernier chasseur de bisons publié en 1958, Tueur de bisons est un témoignage éloquent sur le grand massacre qui eut lieu dans les Grandes Plaines entre 1870 et 1880.

C’est que Frank Mayer n’a pas la langue dans sa poche et un certain goût de la provocation, ce qui rend son récit particulièrement attrayant et instructif. Homme ordinaire parti à l’aventure avec l’espoir – vite déçu – de faire fortune, Mayer se trouve confronté à une chasse qui tient en fait plus du massacre organisé dans lequel il prend toute sa part (« J’étais jeune, 22 ans. Je savais tirer. J’aimais bien chasser. J’avais besoin d’aventures. Et voilà. ») et qui relève autant da la chasse aux peaux que de la chasse aux peaux-rouges comme l’explique alors au narrateur un officier de l’armée :

« Mayer, de deux choses l’une : soit les buffalos doivent disparaître, soit les Indiens doivent disparaître. C’est seulement quand l’Indien sera absolument dépendant de nous pour tous ses besoins qu’on pourra le maîtriser. Pour le buffalo, il est trop indépendant. Mais si on tue le buffalo, on conquiert l’Indien. Ça paraît plus humain de tuer les buffalos plutôt que les Indiens, alors les buffalos doivent disparaître, il a conclu. »

Toutefois, malgré son côté provocateur, Mayer reste lucide sur son parcours et sa participation à ce double massacre et se cherche moins d’excuses qu’il en a l’air au début de son récit lorsque, en fin de compte, il laisse tomber : « Peut-être que nous, les coureurs, on servait nos propres intérêts en participant à la disparition du buffalo. Peut-être que c’est notre moisson impitoyable qui a servi au contrôle de l’Indien pendant une décennie, voire plus. Ou peut-être que je ne fais que me justifier. Peut-être qu’on était qu’une bande de types avides qui voulaient tout pour eux et tant pis pour la postérité, le buffalo et tous les autres, tant qu’on gardait notre scalp et que l’argent coulait à flot dans nos bourses. »

Porté par la verve de Mayer et cette impression d’écouter un récit au coin du feu, on se laisse facilement entraîner dans ce court (moins de 100 pages) livre instructif et passionnant pour tout amateur de western et qui dévoile un peu de la manière dont les États-Unis se sont construits.

Frank Mayer, Tueur de bisons (The Buffalo Harvest, 1958), Anacharsis éditions, 2010. Rééd. Libretto, 2013. Traduit par Frédéric Cotton.

Publié dans Western et aventures

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