Trop court ? Tijuana City Blues, de Gabriel Trujillo Muñoz
Après Loverboy, me voilà enfin avec le premier volume des enquêtes de Miguel Ángel Morgado.
L’avocat mexicain est ici contacté par un ébéniste qui lui demande de bien vouloir enquêter sur une affaire vieille de près d’un demi-siècle. L’artisan lui présente des photographies et coupures de presse qui mettent notamment en scène son père, un américain alors installé à Mexico, et William Burroughs. Le père de l’ébéniste se serait rendu à Tijuana avec deux autres hommes et transportait avec lui une poupée et un mystérieux paquet remis par Burroughs. Pris dans une fusillade, il a purement et simplement disparu. Aiguillonné par sa curiosité, Morgado accepte de s’occuper de cette affaire et de partir sur les traces du passé.
On trouve dans Tijuana City Blues ce qui fait le charme des très courts romans de Gabriel Triujillo Muñoz : une intrigue qui éveille la curiosité du lecteur, une vision mexicaine des relations entre Mexique et États-Unis qui peut se résumer en une réplique de Blondie, l’ébéniste : « Enfoirés de gringos, grommela Blondie. Toujours à nous considérer comme des sauvages. Des brutes. Des bêtes. Et eux ? Ce sont des petits saints ? De purs et durs tueurs en série, oui, voilà ce qu’ils sont, des cinglés de mes deux ».
Comme dans Loverboy, Muñoz ne cache pas son antipathie envers ces yankees qui prennent le Mexique comme un lieu de défoulement et un réservoir humain pour le travail à bas prix ou la prostitution. Cela d’ailleurs sans pour autant exonérer les Mexicains de certaines de leurs responsabilités en la matière. Il a, pour appuyer son propos, le talent de tisser une intrigue aisée à suivre sans être vraiment simpliste sur le fond et, on l’a déjà dit à propos de Loverboy, celui de donner vie et épaisseurs à ses personnages en l’espace de quelques phrases.
Cette concision – le livre compte une centaine de pages – est plaisante, certes, mais aussi frustrante tant il semble que Gabriel Trujillo Muñoz avait la matière nécessaire pour en faire une histoire plus longue. Au total, il nous livre un très bon roman qui aurait sans doute pu être excellent si certains aspects de cette intrigue, qui nous laissent parfois sur notre faim, avaient été développés. C’est en tout cas un roman idéal pour qui cherche une lecture courte et de qualité.
Gabriel Trujillo Muñoz, Tijuana City Blues, les Allusifs, 2009. Rééd. Folio Policier, 2010. Traduit par Gabriel Iaculli.
Du même auteur sur ce blog : Loverboy ; Mexicali City Blues ; Mezquite Road.