Salty, de Mark Haskell Smith

Publié le par Yan

saltyBassiste du groupe Metal Assassin qui vient de se séparer malgré un succès mondial jamais démenti, Turk Henry est sensé se ressourcer en Thaïlande avec sa femme Sheila. Mais entre la chaleur étouffante, la cuisine trop épicée et la difficulté à contrôler ses pulsions après une cure de désintoxication à cause d’une sévère addiction au sexe, Turk s’ennui et déprime. C’est finalement une balade à dos d’éléphant qui va changer la vie de la rock star sur le retour : Sheila est enlevée avec quatre autres touristes par la bande de pirates du capitaine Somporn. Dès lors, tout entier tourné vers sa mission, bien décidé à libérer sa femme malgré les bâtons dans les roues que lui pose Ben Harding, archétype de l’agent américain buté, Turk va se sentir revivre.

S’il égratigne au passage la politique post-11 septembre de George W. Bush et les aberrations du Patriot Act à travers quelques échanges savoureux entre Ben l’agent des douanes et Turk, Salty demeure avant tout un roman de pur divertissement. Alliant exotisme, bière glacée à volonté, mais aussi romance et action qui échappent au ridicule grâce à un sens consommé de la comédie et à un humour outrancier particulièrement bien maitrisé, le livre de Mark Haskell Smith atteint sans problème son objectif, simple de prime abord mais de fait souvent difficile à atteindre, qui consiste à faire rire le lecteur tout en maintenant une intrigue cohérente et un rythme entraînant.

Grâce à des personnages bien croqués, de l’antipathique mais doté d’un potentiel de crétinerie qui ne peut que l’adoucir Ben au mystérieux, dangereux et parfois ridicule Somporn en passant par un Turk paumé qui n’est pas sans évoquer un croisement entre Homer Simpson et Droopy, l’auteur donne de l’épaisseur à un roman qu’il mène avec une jubilation communicative. Ça dézingue à tout va – dans un style qui rappelle souvent Carl Hiaasen – ça boit, ça mange – épicé – et ça transpire le sexe sans jamais abandonner ce ton drolatique qui est la marque de fabrique de Mark Haskell Smith.

Bref, voilà de quoi passer un excellent moment sans pour autant ressentir cette pointe de culpabilité que l’on peut avoir lorsqu’on lit un roman divertissant mais dont on sait qu’au fond, il est bourré de défauts et de facilités. Comédie de très bonne qualité, Salty mérite que l’on s’y arrête.

« ‟Rien à foutre, je ferai l’échange moi-même″. 

[…]

‟Nous ne pouvons pas vous laisser faire.

-Quoi ? Vous venez de dire que vous ne pouviez rien faire. Vous avez vos raisons, pas de problème. Restez en dehors de tout ça. C’est pas vos putains d’oignons.

-Vous êtes citoyen américain, monsieur Henry. Aider une organisation terroriste ou un membre de l’axe de la terreur est une violation du Patriot Act. Si vous essayez de payer la rançon de votre femme, j’ai peur que vous soyez arrêté. Et si vous êtes condamné, vous pourriez écoper de dix à quinze ans de prison.

-Et Sheila ? Elle aussi est citoyenne.

Ben rangea son calepin.

-Je vais être honnête avec vous, monsieur Henry. Nous sommes en guerre. Pensez à ce que feraient ces terroristes s’ils mettaient la main sur un million de dollars.

-Peut-être qu’ils arrêteraient de terroriser le monde et qu’ils ouvriraient un restaurant. C’est ce que je ferais à leur place ».

Mark Haskell Smith, Salty (Salty, 2007), Rivages/Thriller, 2010. Rééd. Rivages/Noir, 2014. Traduit par Julien Guérif.

Du même auteur sur ce blog : Défoncé ; Ceci n'est pas une histoire d'amour ; Coup de vent ;

Publié dans Noir américain

Commenter cet article

B
La Thaïlande est poisseuse et on ficherait des claques à tous les personnages. Le roman reste toute fois rafraichissant comme les bières que s'enfile notre bassiste...
Répondre