Rétrospective Parker (9) : Travail aux pièces

Publié le par Yan

               travail-aux-pieces.jpg Revoilà donc Parker avant de faire un détour du côté de Grofield, abandonné blessé à la fin de Sous pression. Si son complice attendait un médecin, Parker, lui, s’en est plutôt bien tiré et a pu renflouer ses comptes.

 

                La situation semble donc idéale pour prendre quelques mois de repos… un repos que Richard Stark n’entend pas accorder à son héros. Travail aux pièces s’ouvre donc sur un préambule qui nous fait découvrir une nouvelle facette de Parker. En effet, le braqueur froid y apparaît comme un jouisseur, courant comme un lapin de femme en femme et de ville en ville. Certes, on sait depuis le premier volume de la série que Parker, une fois un coup terminé, aime à faire retomber la pression, en particulier en s’attachant pour l’occasion une compagne, séduite ou payée. Toutefois, cette habitude frise là la compulsion, et Parker lui-même n’y comprend pas grand chose. L’obsédé du contrôle qu’il est, rigoureux aussi bien dans le travail qu’en dehors lorsqu’il s’agit de se faire oublier, doit bien se rendre à l’évidence : malgré un confortable matelas de billets en réserve, il veut, il désire ardemment, physiquement, reprendre du service. Au point de sauter sur la première occasion qui lui semble un tant soit peu sérieuse.

 

                « Tu tenteras le coup, assura-t-elle. Je le connais, ton genre de types. Tu parles de sécurité, mais, quand tu renifles la sorte de danger pour lequel tu es fait, tu files comme un chien de chasse qui a senti le gibier ».

 

                Bien entendu, nous savons – et Parker aussi – que l’inévitable grain de sable trainera par là. En l’occurrence, ils sont même plusieurs à se disputer ce rôle dans ce braquage d’un congrès de numismates : l’amateur qui apporte le coup, minable, raté, et amoureux transi d’une sublime veuve vénale, le vieux complice juste sorti de prison et dont Parker craint qu’il ne soit plus en état de tenir correctement son rôle, sans compter deux truands, l’un nazi et l’autre juif qui se vouent bien entendu une haine féroce et, enfin, la veuve cité auparavant, qui jette son dévolu sur Parker.

 

                En montant ce coup qui semble vouer à l’échec, Richard Stark donne un nouveau coup de fouet à sa série. Car si le coup de théâtre est attendu, on ne sait ni quand il va venir, ni d’où. Et Stark arrive d’ailleurs encore à nous surprendre en partie.

                Rythmé, bien mené, ce roman renouvelle un peu le personnage de Parker et, même, lui fournit un nouvel et inattendu acolyte qui ne le quittera désormais plus. Une fois encore, par la dextérité avec laquelle il ciselle de nouveaux détails sur la structure classique de la série, Richard Stark arrive à nous faire prendre au jeu, à nous laisser mener avec plaisir, et nous en livre un volume parmi les plus aboutis.

 

Richard Stark, Travail aux pièces (The rare coin score, 1967), Gallimard, Série Noire, 1968. Traduit par Jacques Hall.

 

Du même auteur sur ce blog : Comme une fleur, Peau neuve, Pour l’amour de l’or, La clique, En  coupe réglée, Rien dans le coffre, Sous pression, Le septième homme, La demoiselle; Le divan indiscret ; Blanc-bleu noir ; La dame ; Un petit coup de vinaigre ; L'oiseau noir ; Planque à Luna-Park ; Les citrons ne mentent jamais ; Le défoncé ; Portraits gratis ; Signé Parker ; Comeback ; Backflash ; Flashfire ; Firebreak ; Breakout ; À bout de course! ; Demandez au perroquet ; Argent sale .

Publié dans Noir américain

Commenter cet article