Rétrospective Parker (11) : Le divan indiscret
Contacté par Fusco, un ancien complice à peine sorti de prison, Parker est mis en contact avec Stan Devers. Nouveau compagnon de l’ex-femme de Fusco, Devers travaille à la trésorerie d’une base aérienne militaire et envisage de faire main basse sur la solde des militaires. S’il est, comme toujours, réticent à l’idée de travailler avec un amateur, Parker doit pourtant bien se rendre à l’évidence : non seulement le coup est possible, mais en plus Devers est malin et doté d’un sang froid digne d’un professionnel. Mais c’est sans compter sur Ellen, la compagne de Devers, qui se confie plus que de raison sur le divan de son psychanalyste.
Le divan indiscret est un de ces romans de Richard Stark qui obéissent strictement au schéma que l’on imagine être la formule habituelle de la série (mais dont on voit, lorsque l’on relit l’intégralité de l’œuvre qu’il est juste le schéma le plus utilisé et qu’il en existe de nombreuses variantes) : on propose un coup à Parker, il l’étudie, le met en place et l’accompli, un grain de sable s’insinue dans la mécanique, Parker règle le problème… ou pas.
Menée de main de maître sur le plan de l’action, l’intrigue mise en place par Richard Stark tire son originalité et une grande part de son intérêt des scènes de consultation d’Ellen chez son psychanalyste. Effrayée par la perspective de revoir son ex-mari et père de sa fille ainsi que son nouveau compagnon finir sous les verrous dans le cas où le casse serait un échec, la jeune femme ne se contente pas d’exposer les détails du braquage à son thérapeute. On s’en doute, Parker, froid et effrayant, est le sujet principal de ces confidences sur le divan. L’occasion pour l’auteur, à travers les paroles d’Ellen, de revenir sur la personnalité de Parker :
« -Je ne peux pas l’imaginer éprouvant quoi que ce soit. Je ne le vois pas en train de pleurer. Ni même de rire.
-J’ai l’impression, dit doucement le docteur Godden, que vous avez fait de cet homme une sorte de personnage mythique, quelque chose de surhumain ».
Les propos de Godden peuvent ici autant s’adresser à Ellen qu’à Richard Stark et, par la voix de ce personnage, l’auteur s’amuse lui-même de sa création. Oui, Parker est un être mythique et, par certains côtés, surhumain. Cela implique toutefois qu’il porte malgré tout une part d’humanité. Il a eu l’occasion de le prouver dans différents volumes où il a pu exprimer rage, désir de vengeance, envie de meurtre ou encore une certaine capacité à se laisser parfois berner qui n’a rien de surhumain. Néanmoins, sa capacité à contrôler ses émotions, son assurance et son application méthodique à compartimenter sa vie comme il prépare un coup en font, en tout état de cause, un être à part qui tient une place importante au Panthéon du polar.
Et cela, Richard Stark nous le démontre par l’exemple dans ce Divan indiscret mené de main de maître et qui apparaît comme l’une des meilleures aventures de ce troublant personnage.
Richard Stark, Le divan indiscret (The green eagle score, 1967), Gallimard, Série Noire, 1968. Rééd. Carré Noir, 1974 (Parker reprend son vol). Traduit par Noël Chassériau.
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