Retour sur 2014
J'ai un peu hésité avant de me plier l'exercice de la rétrospective. Et puis je me suis dit que mes lectures ayant été dans l'ensemble plus agréables que l'an dernier, en particulier en ce qui concerne les auteurs français, il aurait été dommage de ne pas rappeler que quelques bons livres ont émergé de l'immense masse des polars qui sortent tous les ans.
Des 127 romans chroniqués cette année ici, voici donc ceux qui, quelques mois, presqu'un an ou quelques semaines après leur lecture ne sont pas passés aux oubliettes de ma mémoire.
Commençons donc par les Français avec de belles découvertes : Aux animaux la guerre, de Nicolas Mathieu, tout d'abord pour sa peinture âpre, noire et brillante d'une région qui se meurt. Grossir le ciel, de Frank Bouysse (pas une découverte pour tout le monde, puisqu'il a déjà édité plusieurs romans, aux éditions Écorces en particulier) pour la force de l'écriture et ses magnifiques portraits d'hommes. Petite louve, de Marie Van Moere, ou comment importer la vendetta en Corse et parler de l'engrenage de la vengeance. La faux soyeuse, d'Éric Maravélias, pour la violence, le réalisme et la poésie de cette histoire de la dérive d'un junkie.
Il y a aussi eu de belles confirmations : le sublime Après la guerre, d'Hervé Le Corre, qui trace tranquillement son chemin et dont on ne dira jamais assez combien il faut le lire. L'intelligent et poignant L'homme qui a vu l'homme, de Marin Ledun qui livre certainement son roman le plus abouti. Le très sombre Sara la Noire de Gianni Pirozzi avec son écriture serrée et violente. Légèrement en dehors du genre, certes, il ne faut toutefois pas oublier non plus les Trois mille chevaux vapeur d'Antonin Varenne, formidable épopée de la Birmanie aux États-Unis en passant par Londres en pleine révolution industrielle.
Pour le reste du monde, la pioche a été un peu moins bonne, à tout le moins dans le noir stricto sensu. Il a bien sûr eu le fracassant 911, de Shanon Burke, hallucinante descente aux enfers d'un jeune homme finançant ses études en étant ambulancier à Harlem, mais c'est plutôt aux limites du genre ou carrément dans la "blanche" ou le western que j'ai pris le plus grand plaisir à lire des étrangers en 2014 : l'étonnant et puissant Corps à l'écart de l'italienne Elisabetta Bucciarelli, la biographie hilarante d'Attila Ambrus avec, en creux, le portrait étonnant de la Hongrie sortant du communisme dans La ballade du voleur au whisky, de très beaux romans mettant en lien histoires de familles et grande histoire dans une Amérique en mutation : Nos disparus, de Tim Gautreaux, Une terre d'ombre, de Ron Rash et le somptueux Le fils, de Philipp Meyer. Et pour finir, le superbement barré et acéré L'ours est un écrivain comme les autres, de Richard Kotzwinkle.
Et si, aussi, avant de clore la liste, un petit rappel sur le travail des éditions Miroboles qui, de la Moldavie à la Turquie en passant par la Pologne et les épidémies zombies vont chercher des livres de genres très originaux. Elles méritent, avec les tout aussi audacieuses éditions Asphalte, qu'on le signale.
Quant à l'image d'illustration, elle correspond à la plus belle couverture de l'année, celle des Rêves de guerre, de François Médéline, bien sûr.