Nicolas Eymerich, inquisiteur, de Valerio Evangelisti
Depuis le temps… il fallait bien que l’on s’y mette. Après avoir lu et apprécié deux romans de Valerio Evangelisti (Anthracite et Tortuga) on s’est donc attaqué au premier volume du cycle se science-fiction qui a fait sa renommée : les aventures de Nicolas Eymerich.
Nicolas Eymerich est donc inquisiteur et, au début de ce volume, en 1352, devient inquisiteur d’Aragon après la mort de son prédécesseur. Immédiatement, il se trouve confronté à des phénomènes étranges qui ont l’allure d’un complot satanique qu’il entend bien déjouer en même temps qu’il cherche à assoir son autorité contestée.
Parallèlement, on suit les aventures de l’équipage du Malpertuis, vaisseau spatial qui, en 2194, en utilisant une énergie découverte à la fin du XXème siècle par un scientifique rejeté par ses pairs, voyage dans le temps à la recherche d’une mystérieuse cargaison à embarquer.
Autant, le dire tout de suite, la science-fiction, en général, n’est pas notre genre de prédilection. Mais le plaisir éprouvé lors de précédentes lectures d’Evangelisti nous obligeait en quelque sorte à essayer de connaitre mieux son œuvre. Avec l’espoir d’y trouver matière à éprouver le même plaisir de lecture que précédemment.
Et, de fait, bien installé par l’auteur, le personnage de Nicolas Eymerich se révèle fascinant. Austère, mue par un net sentiment de supériorité sur ses semblables, avide de pouvoir, l’inquisiteur a tout de l’antihéros et Evangelisti réussit un petit tour de force en faisant en sorte que le lecteur soit malgré tout – au-delà de la fascination que peut exercer le personnage – attaché à le voir triompher tant il est entouré de personnages encore plus détestables. Ce faisant, Evangelisti crée une ambiance pesante où, à son érudition sur la période traitée (qui n’exclut pas qu’il prenne des libertés avec l’histoire, notamment celle d’Eymerich, qui est un personnage qui a réellement existé) il mêle le fantastique.
Si les chapitres consacrés à Eymerich se révèlent donc plutôt accrocheurs et agréables à lire, il n’en va pas forcément de même en ce qui concernent les passages sur le Malpertuis et les extraits insérés de l’ouvrage du professeur Frullifer sur les psytrons, cette énergie basée sur l’imaginaire propre à faire voyager les humains dans le temps et l’espace, qui se révèlent souvent abscons et assez laborieux.
D’une manière générale, les césures entre les différentes époques, brutales, donnent à la lecture un côté syncopé souvent désagréable. D’autant plus que le lecteur a tôt fait de faire le lien entre ce qui se passe en Aragon en 1352 et sur le Malpertuis en 2194. Cet aspect là de l’histoire, cousu de fil blanc, vient considérablement alourdir l’ensemble là où, sans doute, l’intrigue mettant en scène Eymerich se suffisait à elle-même.
Bref, voilà une lecture bien moins emballante que ce à quoi on s’attendait. Peut-être parce que ce n’est que le premier volume et qu’Evangelisti n’avait alors pas encore réussit à bien mettre son écriture en place ? Peut-être aussi parce que l’on n’est pas assez familiarisé avec la science-fiction. On est en tout cas resté un peu à côté.
Valerio Evangelisti, Nicolas Eymerich, inquisiteur (Nicolas Eymerich, inquisitore, 1994). Payot & Rivages, 1998. Rééd. La Volte, 2011. Traduit par Serge Quadruppani.
Du même auteur sur ce blog : Tortuga.