Les illusions perdues : La photo de Lime, de Leif Davidsen
Peter Lime est un ancien grand photographe de presse reconverti dans la presse à scandale. À la tête, avec deux associés et amis de jeunesse, d’une agence de photo, il continue à exercer son art comme paparazzo. Peter Lime estime avoir réussi sa vie : il est riche, il s’est installé en Espagne avec sa femme et sa petite fille, il est entouré d’amis fidèles…
Tout bascule le jour où une ancienne photo prise par Lime refait surface et où un attentat coûte la vie à sa femme et à son enfant. Si la police espagnole a tôt fait de mettre l’attentat sur le dos d’ETA, Lime tient à mener son enquête : elle va le mener du Pays Basque à Moscou, en passant par le Danemark et Berlin et, surtout, dans son passé.
Et voilà pour mon deuxième écrivain nordique. Après Nesbø qui m’avait mené en Australie, Davidsen me transporte un peu partout en Europe mais quasiment pas en Scandinavie, si ce n’est pour une très courte étape au Danemark.
Pour autant, comme pour Nesbø, j’ai apprécié le voyage. Grand reporter lui-même, Leif Davidsen maîtrise son sujet et ses descriptions de la situation politique au Pays Basque, dans l’Espagne franquiste puis de la transition démocratique, de l’Allemagne d’après la chute du Mur ou de la nouvelle Russie, sont particulièrement documentées. Ce n’est bien sûr pas seulement un roman d’espionnage mais aussi une réflexion sur la perte des utopies ou leur corruption, sur la manière dont on peut s’accomoder de ses anciens idéaux quand on semble les avoir abandonné ou comment on peut essayer de les faire coller avec ce que l’on est devenu quand on a finalement choisi de prendre un autre chemin.
La photo de Lime n’est pas un roman d’espionnage au rythme trépidant. Il prend son temps, mais arrive à nous happer dans une histoire qui, malgré quelques longueurs parfois, s’avère passionnante. On voyage, on s’instruit, on frémit et on suit avec plaisir Lime qui tente de démêler les fils de son histoire et de celle de cette jeunesse révolutionnaire des années 1970.
Un bon roman.
Leif Davidsen, La photo de Lime, Gaïa, 2000. Rééd. Folio Policier, 2009. Traduit par Monique Christiansen.