La nuit de Tomahawk, de Michael Koryta
Frank Temple III porte un héritage aussi lourd que son nom. Son père, ancien du Viêtnam, agent fédéral, était aussi tueur à gages. Frank avait 17 ans quand, démasqué par le FBI après avoir été trahi, son père s’est suicidé. Depuis, il tente de refaire sa vie en oubliant son passé et notamment la violence à laquelle son père l’avait initié et qu’il porte encore en lui.
Sept ans plus tard, un coup de fil va tout changer. Frank est averti que Devin, celui dont il pense qu’il a donné son père au FBI, serait de retour à Tomahawk, le lieu où il possédait un bungalow avec son père. Avide de vengeance, le jeune homme fait route vers la petite ville du Wisconsin. Mais il se trouver confronté à autre chose que ce qu’il avait prévu.
Les trois premiers romans de Michael Koryta, qu’on nous a un peu vite vendu comme « le surdoué du polar » parce qu’il avait publié son premier livre à 21 ans et qu’il avait été nominé pour les Edgard Awards, étaient engageants sans pour autant s’avérer inoubliables. S’ils bénéficiaient toujours d’une intrigue bien ficelée dans le plus pur respect de ce que savent produire les ateliers d’écriture américains, ils souffraient néanmoins de nombreux clichés, de ficelles trop grosses, de personnages un peu trop lisses, à commencer par le héros récurent Lincoln Perry, pur privé hard-boiled qui manquait pourtant singulièrement de personnalité. Ceci dit, ces défauts de jeunesse avaient tendance à s’effacer lentement d’un roman à l’autre.
Avec La nuit de Tomahawk, Koryta abandonne Perry pour une histoire qui, sans être particulièrement originale, est néanmoins prometteuse. Il y campe quelques personnages intéressants et maîtrise plutôt bien son intrigue. Néanmoins, le style s’avère un peu lourd dans l’ensemble malgré quelques moments où, dans divers registres, de l’humour au suspense, l’auteur se fend de belles pages.
Le problème de Michael Koryta est qu’il cherche à tout prix à ce que ses héros aient une zone d’ombre mais qu’ils soient toutefois, au fond, de très chics types. Le résultat est qu’ils apparaissent un peu fades et que l’auteur ne voudrait pour rien au monde qu’il leur arrive un incident fâcheux. Du coup le lecteur n’est jamais vraiment inquiet pour eux. À ce titre, le conflit moral qui agite Frank Temple, tout comme celui qui agite Ezra Ballard ou encore l’agent Grady auraient gagné à être traités avec plus de finesse. Enfin Koryta tend un peu trop à vouloir tout expliquer à son lecteur, alourdissant encore son propos.
En fin de compte, La nuit de Tomahawk se laisse lire sans déplaisir mais les clichés et les maladresses font aussi que c’est un roman que l’on oublie aussi vite qu’on l’a lu.
Michael Koryta, La nuit de Tomahawk, Seuil Policier, 2010. Rééd. Points Policier, 2011. Traduit par Alain Defossé.