Killer Country, de Mike Nicol

Publié le par Yan

killer-countryDeuxième volet de la trilogie annoncée par l’auteur, Killer Country emmène donc dorénavant le lecteur en terrain connu[1] après La dette. Et les héros, Pylon et Mace, ancien combattants de la Cause chargés des basses œuvres et trafiquants d’armes reconvertis dans la sécurité pour touristes aisés et hommes d’affaires, tout comme leur ennemie jurée Sheemina February, qui a eu le malheur de passer entre leurs mains du temps où ils combattaient dans la clandestinité, sont maintenant bien campés.

De fait, s’il continue à dévoiler les bribes de leur passé et à montrer la manière dont Mace remet de plus en plus en question sa façon de vivre, Mike Nicol peut un peu plus se concentrer sur le désir de vengeance de Sheemina, ses atermoiements face aux sentiments ambivalents que lui inspirent Mace, et surtout sur le tueur qu’elle place sur la route des deux gardes du corps.

Cette partie, qui tient avant tout du thriller efficace dans lequel l’auteur manie avec maîtrise la tension, sachant la relâcher par intermittence pour mieux enfoncer le clou un peu plus tard est incontestablement réussie même si elle demeure relativement attendue.

Mais, comme dans La dette, ce qui fait l’intérêt de Killer Country, c’est surtout la trame sur laquelle vient se greffer cette intrigue. C’est la manière dont Mike Nicol pointe les dérives d’une société post-apartheid qui fait mine d’avoir laissé le passé derrière elle alors qu’il l’imprègne et que, même, il ressurgit avec violence. C’est aussi la façon qu’a Nicol de pointer la complexité d’une société dans laquelle les alliances d’hier ne sont plus celles d’aujourd’hui, tenant plus à des questions de renvois d’ascenseurs liés essentiellement à l’argent qu’à des questions raciales. Ainsi voit-on se former en filigrane l’image d’une société gangrénée par la corruption ici illustrée par de juteuses affaires immobilières qui éclairent par ailleurs la façon dont l’Afrique du Sud peine à combler le fossé qui sépare les plus pauvres des plus riches.

Peut-être encore un peu caricatural dans sa façon d’aborder les dilemmes intérieurs de Mace et Sheemina, Mike Nicol n’en réussit donc pas moins à proposer une nouvelle fois un roman agréable qui sait mêler habilement l’action et la peinture de la société dans laquelle cette dernière prend pied. C’est violent, plutôt trépidant, et instructif. Bref, du roman noir tout à fait recommandable.

Mike Nicol, Killer Country (Killer Country, 2010), Ombres Noires, 2014. Traduit par Estelle Roudet.

Du même auteur sur ce blog : La dette ; Du sang sur l'arc-en-ciel ; Power Play ; L'Agence ;

 

[1] Si le roman peut certainement se lire à part, il sera indéniablement plus facile d’accès pour qui a déjà lu le précédent.

Publié dans Noir africain

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