Nul ennemi comme un frère, de Frédéric Paulin

Publié le par Yan

Après sa trilogie sur la montée du terrorisme islamiste de 1992 à 2015 puis un détour par Gênes au moment du G7 de 2001, Frédéric Paulin revient avec une nouvelle fresque historique qui nous fait remonter un peu plus loin dans le temps et nous amène dans le Liban et la France des années 1975-1983 dans ce premier volume d’une trilogie annoncée.

Le 13 avril 1975, Pierre Gemayel, chef des Phalanges chrétiennes est blessé par balles à Beyrouth au sortir de l’inauguration d’une église. En représailles, les phalangistes attaquent un bus de militants palestiniens, tuant 27 personnes. C’est le début du long conflit fratricide qui va meurtrir le Liban jusqu’en 1990. En France, en 1979, dans la lignée de la Fraction Armée rouge allemande, des Brigades rouges italiennes et des Brigades internationales, se crée le mouvement terroriste révolutionnaire prolétarien Action directe. Dans ce bouillonnement, des femmes et des hommes se croisent, s’aiment, se déchirent, se détruisent. Frédéric Paulin nous entraîne à leur suite. Diplomate français amoureux et désespéré, phalangistes et chiites en guerre, arriviste chargé de se frayer un chemin politique au sein de la droite française pour la cause libanaise, juge opiniâtre et tiraillée entre ses amours, sa famille et sa morale, flics et chiens de guerres ravagés par les événements et leurs sentiments…

C’est un tourbillon dans lequel nous plonge Frédéric Paulin dans un début de roman saisissant qui voit entrer en scène une multitude de personnages. Il convient alors de ne pas se laisser impressionner par cette profusion, de l’accepter, chacun trouvant peu à peu sa place et sa consistance au fil du roman. Dès lors, on entre de plain-pied dans l’ambitieux projet de l’auteur. Ça n’est en effet pas une mince affaire et pas le moindre des desseins que de vouloir offrir au lecteur à la fois le tableau d’une époque et de lieux aussi agités par des courants complexes et un vrai roman d’espionnage et de politique. Il n’est certainement pas simple non plus pour un auteur de se placer à la fois au cœur de l’action et des personnages qui y agissent et au-dessus d’eux pour éviter les simplifications et le manichéisme. Frédéric Paulin y arrive avec talent au terme d’un travail de toute évidence considérable. Et on se laisse entraîner là-dedans avec une curiosité qui se mue rapidement en besoin avide de connaître la suite et de suivre les personnages qui tentent de se hisser vers d’inatteignables sommets et, souvent, glissent plus ou moins lentement vers d’insondables abîmes. On attend déjà la suite.

Frédéric Paulin, Nul ennemi comme un frère, Agullo, 2024. 472 p.

Du même auteur sur ce blog : Le monde est notre patrie ; La guerre est une ruse ; Prémices de la chute ;

Publié dans Noir français, Espionnage

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