2020. Quelques bonnes lectures tout de même
On dit beaucoup de mal de 2020 qui n’a pourtant rien demandé. Et si les parutions ont été bouleversées par le(s) confinement(s), au risque pour certains livres de passer sous les radars, on a pu tout de même bénéficier de belles lectures. En ce qui me concerne, et pour diverses raisons, les miennes ont été moins nombreuses que d’habitude. Le manque de temps m’a forcé à faire des choix. Autant dire qu’alors j’ai plutôt choisi des livres qui devaient a priori me plaire, et ça a souvent été le cas. D’autres dont j’espère aussi qu’ils me plairont attendent patiemment d’être lus et j’espère bien que j’aurai le temps. En attendant voici une petite sélection de livres de 2020. Sélection tout subjective. Ceux qui me sont venus en premier en repensant à cette année, ceux qui, pour une raison ou une autre m’ont accompagné plus longtemps que d’autre après que je les ai lus.
La première chronique de l’année d’abord, Et toujours les forêts, de Sandrine Collette, roman post apocalyptique que l’on peut d’une certaine manière aussi voir avec le recul comme une sorte de roman de confinement. Mais du genre à faire passer en comparaison nos confinements comme d’assez chouettes promenades de santé.
Et puisqu’on parle d’enfermement, on peut aussi s’offrir un voyage au Mexique avec Mictlán, de Sébastien Rutés, dans la cabine d’un camion frigorifique transportant des centaines de cadavres, ou plus près de chez nous, sur un causse du sud de la France, aux côtés d’un homme en fuite avec La science de l’esquive, de Nicolas Maleski. Ou alors, on peut aussi s’enfermer dehors, dans le silence ouaté de la pampa enneigée avec Je suis l’hiver, de Ricardo Romero.
De la neige, il y en aussi en Ukraine. Et du sang dessus. Benoît Vitkine, nous emmène dans le Donbass pour un premier roman souvent saisissant et toujours instructif.
Il y a aussi eu ces livres attendus avec impatience et qui – heureusement – n’ont pas déçu. Parmi eux, malchanceux d’être sorti à la veille du premier confinement et qui mérite amplement qu’on le lise, Banditi, d’Antoine Albertini qui poursuit sa peinture âpre de la Corse. Le magnifique est déchirant Paria, de Richard Krawiec, a été un choc en début d’année. Plus léger à leur manière, de fort bons polars ont confirmé l’intérêt de séries inaugurées récemment : Temps noirs, de Thomas Mullen et Somnambule, de Joseph Knox. On attendait aussi les nouveaux romans de David Joy (Ce lien entre nous) et de Benjamin Whitmer (Les dynamiteurs) ; ils n’ont pas déçu. On a pu aussi se remettre au polar portugais avec l’excellent Club de Macao, de Pedro Garcia Rosado, et ce fut bien agréable. Quant à Colson Whitehead, ses Nickel Boys ont achevé de nous convaincre de son formidable talent de conteur.
Joëlle Losfeld nous a fait faire le grand écart : d’un côté la réédition d’un roman noir sublime du légendaire Jean Meckert, Nous avons les mains rouges, de l’autre un tout premier roman saisissant et poétique, De nos ombres, de Jean-Marc Graziani. Autre premier roman magnifique, Ce qu’il faut de nuit, de Laurent Petitmangin, a fait un beau chemin cette année.
On a enfin eu besoin d’évasion, cette année. Dominique Maisons nous l’a apporté avec Avant les diamants qui nous propulse à Hollywood du temps de la chasse aux sorcières aux côtés de producteurs véreux, de mafieux, de jeunes aspirants stars prêts à se brûler les ailes, d’Hedy Lamarr, d’Errol Flynn ou Robert Mitchum. Autre temps et autres lieux, Abir Mukherjee, lui, nous entraînait pour la deuxième fois dans l’Inde coloniale avec Les princes de Sambalpur : harem, temples hindous et exécution capitale par éléphant, on peut difficilement voyager plus.
Et pour terminer, je n’ai chroniqué qu’une seule bande dessinée, mais quelle bande dessinée : L’accident de chasse, de David Carson et Landis Blair, est tout simplement un objet hors du commun pour une histoire noire passionnante et émouvante.