Power Play, de Mike Nicol

Publié le par Yan

Cela faisait près de trois ans que l’on attendait un nouveau roman de Mike Nicol. Et si l’on peut regretter que le troisième volume de la série « Vengeance » ne soit jamais paru aux éditions Ombre Noire, on peut en tout cas se réjouir du fait que : le Seuil publie les autres romans noirs de Nicol et que le dernier en date, même s’il met en scène des personnages attachés à la série susdite, reste compréhensible malgré l’absence d’un épisode.

En effet, Power Play met d’abord en scène Krista Bishop, la fille de Mace que l’on avait découvert avec son associé Pylon Buso dans La Dette, puis dans Killer Country. Les deux associés retirés des affaires, Krista a repris les rênes de leur entreprise de sécurité avec Tami, qui travaillait déjà pour eux. Contactées par Mart Velaze, un espion avec lequel Mace est en dette, Krista Tami se trouvent dans l’obligation de veiller sur deux hommes d’affaires chinois venus traiter au Cap. Au même moment, Titus Anders, ancien chef du gang des Pretty Boyz, devenu un notable sans pour autant cesser de contrôler en sous-main trafics de drogues et d’ormeaux, est entré en guerre contre Tamora Gool, la dirigeante ambitieuse d’un autre gros gang, les Mongols, qui compte bien mettre la main sur la Vallée de l’Abondance, territoires des Pretty Boyz. Et la guerre entre les deux clans est particulièrement sale : outre quelques meurtres de petites mains dans les quartiers, Anders et Tamora s’en prennent directement à leurs propres enfants. Tamora a commencé par liquider un fils de Titus Anders, qui lui rend la pareille et l’escalade commence.

Comme dans ses précédents romans noirs, Mike Nicol use d’une intrigue criminelle assez complexe pour mieux révéler les failles et les contradictions de la société sud-africaine et en particulier la manière dont la corruption la gangrène. Car c’est bien entendu cela qui est au cœur du conflit entre les gangs et de l’arrivée même de ces hommes d’affaires chinois sur lesquels Tami et Krista doivent veiller.

À travers cela, Mike Nicol parle d’un pays prêt à se vendre au plus offrant pour peu que quelques notables et politiciens puissent en tirer profit. Les parcours croisés de Titus, ancien gangster devenu membre éminent de la bonne société du Cap, et de Tamora, qui est en train de se frayer le même chemin par la force, sont aussi révélateurs de cet état de fait que la manière dont les différents services secrets et policiers se tirent dans les pattes pour mieux soutenir les poulains qui seront un jour susceptibles de leur renvoyer l’ascenseur. Quant aux petits gangsters qui fraient en bas de l’échelle, comme Hardlife MacDonald dont le témoignage vient conclure chacun de chapitres, ou Black Aron le chauffeur de Tamora, ils ne sont là que pour servir de chair à canon. Ils sont la masse à laquelle on a ôté toute possibilité de choisir, et qui pourra, au mieux, servir de marche pied à ceux qui les utilisent pour asseoir leur pouvoir.

Tout cela, Mike Nicol le dit avec dextérité à travers une intrigue complexe mais fluide qui rend son roman trépidant. À la fois page turner et instantané d’un pays qui peine à sortir de l’ornière dans laquelle les divers gouvernements, à travers leurs liens avec la pègre, l’ont enfoncé, Power Play est une nouvelle preuve du talent de raconteur de Mike Nicol.

Mike Nicol, Power Play (Power Play, 2014), Seuil, Cadre Noir, 2018. Traduit par Jean Esch. 378 p.

Du même auteur sur ce blog : La Dette ; Killer Country ; Du sang sur l’arc-en-ciel ; L'Agence ;

Publié dans Noir africain

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F
Après la série de Nicol, un voyage au Cap en AFSUD ?????????
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