Mr Mercedes, de Stephen King

Publié le par Yan

Le printemps ayant été pour moi synonyme de nombreux déplacements en voiture, j’ai eu moins de temps pour lire mais j’ai quelque peu compensé avec des livres audio et notamment deux romans de Stephen King qui, si j’en crois Wikipédia, sont les premiers volets d’une trilogie centrée sur le personnage de Bill Hodges, officier de police en retraite d’une ville moyenne du Middle West : Mr Mercedes, donc, et Carnets Noirs.

Le point de départ de Mr Mercedes est un meurtre de masse. Un matin de 2009, à l’aube, une Mercedes fonce dans une foule de demandeurs d’emplois venus faire la queue pour une bourse au travail mise en place par la mairie. Le tueur s’échappe laissant derrière lui huit cadavres et des dizaines de blessés. Bill Hodges, chargé de l’enquête ne mettra jamais la main sur lui. Le seul élément matériel étant cette Mercedes, retrouvée plus tard sur un parking, et qui a été volée à Olivia Trelawney, riche veuve unanimement détestée qui finira par se suicider.

Un an plus tard, Bill Hodges, qui a pris sa retraite est contacté par le tueur. Celui-ci, Brady Hartsfield, jeune employé d’un marchand de glaces et d’une société de dépannage informatique entend pousser l’officier de police au suicide. Mais c’est sans compter sur l’opiniâtreté du vieux flic auquel la perspective d’enquêter librement sur celui que tout le monde surnomme Mr Mercedes donne un second souffle.

Stephen King quitte donc, comme cela lui arrive régulièrement, le fantastique pour se colleter au thriller – beaucoup – et au roman noir – un peu et essentiellement dans un exercice de style sous forme d’hommage aux grands ancêtres comme Hammet, Chandler et James Cain. Cela n’empêche bien entendu pas le suspense et la mise en place, dans laquelle King est un maître incontesté, d’une ambiance pesante et riche de menaces. Il est d’ailleurs remarquable de voir combien il arrive à maintenir l’attention du lecteur grâce à cette atmosphère si particulière alors que l’histoire en elle-même demeure assez banale et que bien souvent, lorsque l’on touche au cas de Brady Hartsfield et à sa folie, il aligne les poncifs sur les tueurs jusqu’à la caricature. Sans doute est-ce là le grand talent de Stephen King, qui arrive à compenser ces clichés rebattus par une formidable capacité à installer la peur. À ce propos, l’histoire du frère d’Hartsfield, pourtant assez banale dans le genre, se révèle particulièrement éprouvante.

Le format du livre audio joue certainement aussi dans la création de cette atmosphère. La mise en voix d’Antoine Tomé s’avère très réussie en ce qui concerne la narration et une bonne part des dialogues même si son interprétation des personnages féminins, à laquelle on finit par s’habituer, est assez déstabilisante parfois.

Intéressant exercice de style autour d’une histoire qui, faute d’être originale, se révèle à tout le moins efficace, Mr Mercedes est un ouvrage agréable bien qu’assez loin des meilleurs ouvrages de Stephen King. Il permet surtout de mettre en place des personnages et des lieux que l’on retrouvera dans le bien plus convaincant et touffu Carnets Noirs et de dresser en filigrane le portrait d'une Amérique loin des grands centres urbains laminée par la crise des subprimes.

Stephen King, Mr Mercedes (Mr Mercedes, 2014), Albin Michel, 2014. Rééd. Audiolib, lu par Antoine Tomé. Traduit par Océane Bies et Nadine Gassie.

Du même auteur sur ce blog : Carnets noirs ; Ça ;

Publié dans Noir américain

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M
Je voulais juste ajouter, mais sans doute vous le saviez déjà, l'adaptation en série est remarquable. Je recommande à tous les fans de Stephen King, qui du reste a été très satisfait de l'adaptation de David E. Kelley. Brendan Gleason en vieux flic est irrésistible.
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G
j'écoutais en audiolib le we dernier en voiture "Juste avant le crépuscule" ! tu me donnes envie de continuer avec ce roman noir ...
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C
je l'ai lu en anglais et d'un seul coup ou presque;ça commence comme un pastiche de thriller, mais après, wouh, on décolle! Beaucoup de "métas" ou références à ses oeuvres précédentes et aux films adaptés de, ce qui fait qu'on se sent at home; j'ai vraiment été prise par l'histoire.
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