Bouclage à Barcelone, de Xavier Bosch

Publié le par Yan

Dani Santana, présentateur télé vedette accepte de devenir directeur de la rédaction du Crònica, journal qui se place en troisième position dans la presse quotidienne barcelonaise. Prenant à cœur sa mission de relever les ventes du titre, il s’appuie sur Senza, chef de la rubrique Société tout juste revenu de dépression pour sortir quelques scoops qui secouent autant la population que le microcosme politique et médiatique de la capitale catalane. Car Senza a su former un sacré réseau d’informateurs, de l’intendante de police avec laquelle il entretient une liaison aux jeunes immigrés syriens du quartier du Raval.

Disons-le d’emblée, l’intérêt de Bouclage à Barcelone  repose moins sur son intrigue – une histoire assez banale de préparation d’attentats par un groupe intégriste qui s’agite en arrière-plan – que sur son propos sur le journalisme. Xavier Bosch s’amuse ainsi à décrire le fonctionnement d’une presse devenue avant tout un moyen pour quelques riches entrepreneurs qui y ont investi de gagner encore en influence. Journaliste lui-même, Bosch pointe avec acuité les dérives d’un journalisme qui est aujourd’hui une industrie sans être pour autant une industrie comme les autres. Car si les employés y sont traités comme ailleurs avec ce qu’il faut de paternalisme faussement bonhomme mâtiné de menaces à peine voilées, la machine médiatique est avant tout une machine à faire ou défaire les réputations dans laquelle tout ne se dit pas et tout ce qui se dit n’est pas forcément la vérité.

« Si Franquesa savait…

Si les gens savaient…

Si nous autres journalistes pouvions raconter ce que nous savons… »

dit Dani Santana, conscient de ce qu’il est et de ce qu’il est censé être, sous la coupe de son patron mégalomane et soucieux de s’attirer les bonnes grâces de ceux qui dirigent la ville.

Ainsi donc, plus que par son anecdotique intrigue, Bouclage à Barcelone se révèle un roman intéressant par la façon dont Bosch prend un malin plaisir à faire peu à peu surgir les réseaux qui sous-tendent les actions de ses personnages et la façon dont tous se retrouvent à la fois manipulateurs et manipulés de manière parfois vertigineuse puisque d’aucuns en arriveraient presque à se manipuler eux-mêmes. Sans révolutionner le genre, Xavier Bosch propose ainsi un roman dont l’intérêt repose pour beaucoup sur cette façon de dévoiler l’envers du décor journalistique et un cynisme bienvenu.

Xavier Bosch, Bouclage à Barcelone (Se sabrà tot, 2009), Liana Levi, 2015. Traduit par François-Michel Durazzo et Laurent Gallardo. 268 p.

 

 

Publié dans Noir espagnol

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